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Boston : capitale économique, historique et culturelle de la Nouvelle Angleterre

Boston tient une place à part au sein de la nation nord-américaine, au même titre que la Nouvelle-Angleterre. Par son histoire, sa vie culturelle et artistique, voire sa mouvance politique, il ne fait nul doute qu’elle soit devenue un pôle majeur dans le cœur des Américains. La capitale de l’État du Massachusetts est peut-être aussi la plus européenne des villes des États-Unis. Ce qui ne l’empêche pas de demeurer moderne, dynamique en se plaçant parmi les villes les plus progressistes du pays.

Par Christian Sorand

Il est fort probable que l’histoire et la prospérité de Boston soient dues à une position géographique privilégiée. En regardant une carte, on s’aperçoit qu’elle jouit d’un emplacement stratégique exceptionnel : la côte de Nouvelle-Angleterre est la plus proche du continent européen. Sa proximité des rives canadiennes de la Nouvelle-Écosse et de Terre-Neuve, et donc du Groenland et de l’Islande, a joué un rôle majeur dans sa fondation pour les premiers explorateurs, et aussi pour les pêcheurs venus de Bretagne et du Portugal. Simple fait de géopolitique, où la découverte d’un port naturel protégé par des îles, à l’embouchure d’un fleuve (Charles River), a tout simplement favorisé la première colonie d’immigrants. Et de fil en aiguille, c’est ainsi qu’est née Boston. Étant donc un berceau du Nouveau Monde, la ville coloniale a généré une nouvelle aristocratie avide de retrouver ses origines européennes dont sont issues les prestigieuses institutions culturelles (Harvard, MIT, Radcliffe College). Or, c’est également ici que s’est forgé l’esprit d’une jeune nation, semant éventuellement les germes de l’indépendance américaine. Pour les Français, cette métropole régionale conserve des racines culturelles indélébiles liées à l’histoire et au courant de pensée de l’époque.

Le berceau de l’Amérique

Boston n’a pas le profil habituel d’une ville américaine. Certes, il existe bien un downtown planté de gratte-ciel délimitant le centre des affaires. Et pourtant la ville n’est pas conçue selon le principe du damier.

L’histoire explique une nouvelle fois cette particularité. En 1630, les fondateurs étaient un groupe de puritains anglais qui baptisèrent Boston du même nom que la petite ville du Lincolnshire d’où ils venaient. Ils recréèrent le style architectural de leur patrie d’origine. Le ‘Boston Common’, fondé au XVIIe siècle, est un vaste espace vert du centre-ville, rappelant l’Angleterre. Cet immense parc a une fonction comparable à celle de Central Park à New York. Très vite, une série d’événements va secouer la colonie britannique : le massacre de Boston (1770), le Boston Tea Party (1773), puis le siège de Boston (1775-76). La ville joue un rôle clé pendant la guerre d’indépendance américaine. Deux hommes politiques majeurs sont bostoniens : Benjamin Franklin et Samuel Adams. Outre le diplomate parisien qu’est devenu Franklin, quelques Français se sont illustrés localement. Il y a d’abord eu Paul Revere (1735-1818), fils d’un huguenot de Gironde. Le vrai nom de son père était Apollos Rivoire, arrivé en Amérique à l’âge de treize ans après la révocation de l’édit de Nantes. Paul Revere, son fils, est devenu l’un des héros de la guerre d’indépendance par sa chevauchée patriotique de la nuit du 18 avril 1775 (Midnight’s Ride). Une autre famille de huguenots, les Faneuil, a tenu un rôle important dans l’histoire locale. Le riche marchand Peter Faneuil, né en 1700 à New Rochelle dans l’État de New York, s’était établi à Boston pour gérer son commerce triangulaire avec les Antilles. Il fit don de Faneuil Hall, un marché et un lieu de rencontres politiques, devenu aujourd’hui l’un des monuments jalonnant le « chemin de la Liberté » (Freedom Trail) de la ville de Boston. À proximité, au coin d’Union Street, se trouve une vieille taverne : Ye Old Union Oyster House. En 1796, un certain Monsieur d’Orléans vivait au 1er étage et donnait des cours de français à des jeunes Américaines… avant de devenir plus tard le roi de France, Louis Philippe !

Boston est parsemée de lieux historiques. La colline de Beacon Hill est un vieux quartier résidentiel aux belles demeures victoriennes et aux rues pavées, à deux pas du Massachusetts State House et du Common. L’une des étapes du chemin de la liberté est un cimetière : Old Granary Burying Ground, (XVIIe) sépulture des grands révolutionnaires comme Peter Faneuil, Paul Revere, Samuel Adams, ou encore de Mère l’Oie (Mother Goose) auteure de comptines célèbres.

Centre intellectuel et culturel

Boston ne doit pas sa notoriété seulement au passé. La ville se distingue aussi comme étant un formidable foyer culturel et intellectuel.

Un fleuve (Charles River) sépare la ville de Boston de celle de Cambridge. C’est sur cette rive que se trouvent quelques-unes des plus prestigieuses universités du pays : l’université Harvard et sa contrepartie féminine, Radcliffe College, ou encore le MIT (Massachusetts Institute of Technology).

Au XIXe siècle, Boston est devenue si célèbre qu’on l’a surnommée « l’Athènes de l’Amérique ». Edgar Allan Poe (1809-1847), poète et romancier, est né à Boston. Deux écrivains célèbres sont venus s’y réfugier par la suite : le Libanais Gibran Khalil Gibran (1883-1931) et le Roumain Elie Wiesel (1928-2016). C’est aussi la ville du peintre américain John Singleton Copley (Boston,1738-Londres,1815) et celle où l’architecte Ieoh Ming Pei y a étudié et construit (John Fitzgerald Kennedy Library). Bien que le clan des Kennedy soit originaire du Cap Cod, au sud du Massachusetts, c’est à Boston que Robert et John Kennedy ont fait leurs études.

La musique y tient aussi un rôle majeur. On y trouve une académie de musique, un conservatoire de musique et surtout l’orchestre symphonique de Boston, classé parmi les dix meilleurs du monde.

Boston a aussi ses musées. Il y a bien sûr le Tea Party Museum près du pont de Congress Street, où se trouve la réplique du ‘Beaver II ‘, l’un des trois bateaux de la partie de thé (Boston Tea Party) ; il y a ensuite le musée de l’USS Constitution (1797), premier navire de la jeune nation américaine. La visite de deux autres musées s’impose pourtant. Tout d’abord, le musée des Beaux-Arts (1905), l’un des plus vastes et des plus riches de toute l’Amérique. Le bâtiment construit en style néo-classique comporte huit départements : l’art asiatique, les antiquités égyptiennes, les antiquités grecques et romaines, les arts décoratifs européens, les peintures européennes, l’art américain, les estampes et les dessins, les textiles et l’art contemporain. Les collections de peintures pré-impressionnistes (Corot, Courbet, Delacroix, Millet) et surtout impressionnistes sont particulièrement riches (Degas, Gauguin, Manet, Monet, Renoir, Van Gogh). Une salle entière est ainsi dédiée à Claude Monet. On peut y voir « la Japonaise », des tableaux du jardin de Giverny et de la cathédrale de Rouen. Il y a également un autre très beau petit musée édifié dans le style d’un palais vénitien du XVe siècle: Isabella Stewart Gardner Museum (1903). La cour intérieure est abritée par une verrière faisant l’effet d’une serre sur un jardin tropical. Les collections éclectiques incluent des meubles anciens, des tapisseries, une mosaïque romaine, un cloître espagnol, des céramiques mexicaines du XVIIe siècle, un vitrail du XIIIe siècle provenant de la cathédrale de Soissons. Certaines salles mettent en valeur des époques artistiques : la salle des primitifs italiens, la salle de Raphaël, la salle Véronèse ou encore celle de Titien ; et puis également les salles hollandaise et gothique. Les œuvres exposées sont celles de Rembrandt, Raphaël, Titien, Botticelli ou encore Michel-Ange, mais aussi celles de peintres français comme Degas, Manet ou Matisse.

Le creuset d’une région prospère

Centre économique majeur pour la région de Nouvelle Angleterre le port naturel a tout d’abord contribué à sa richesse. Au XVIIe et XVIIIe siècles, le commerce maritime triangulaire se faisait avec la Grande Bretagne et les Antilles. Puis, à partir du XIXe, l’immigration italienne et irlandaise a transformé la sociologie urbaine. L’aristocratie locale, puritaine et protestante, s’est soudain vue confrontée à une nouvelle classe de religion catholique (le clan des Kennedy). C’est à Boston qu’a eu lieu en 1927 l’exécution de deux anarchistes italiens (Nicola Sacco et Bartomoleo Vanzetti). De plus, il existe une importante minorité asiatique, dont le Chinatown est un témoin exotique visible. Le premier métro du continent américain, avant New York et Chicago, a été construit à Boston en 1896. Dans les années 1970, Boston connaît un renouveau économique. C’est au tour de la finance et des biotechnologies de s’y implanter. La compagnie Gillette y possède son siège social.

Le charme de la ville ne tient donc pas seulement à son passé historique européen. Il y a eu une volonté de créer et de conserver une quantité d’espaces verts pour le bien-être de tous. Le Common s’est doublé d’un magnifique jardin comportant lac et fontaines. Les rives de la Charles River ont été aménagées pour recevoir les promeneurs, les joggeurs et aujourd’hui surtout, une quantité inouïe de vélos. Les beaux quartiers huppés de Back Bay ou de Beacon Hill lui confèrent un attrait supplémentaire. L’aéroport international est proche de la ville et surtout très bien desservi par les bus et le métro. Boston n’a peut-être pas le cosmopolitisme urbain de New York ou la personnalité de San Francisco, mais elle n’en demeure pas moins la plus européenne et l’une des plus agréables communautés urbaines des États-Unis.

Sources

• Wikipédia

MIT-Massachusetts Institute of Technology :

https://en.wikipedia.org/wiki/Massachusetts_Institute_of_Technology

• Museum of Fine Arts, Boston : http://www.mfa.org

• Isabella Stewart Gardner Museum :

http://www.gardnermuseum.org/home

Bibliographie

• Nouvelle-Angleterre, Guides verts Micelin, 1ère édition, Clermont-Fd, 1981, ISBN 2-06-005-680-2

• New England, Top 10, Eyewitness Travel, DK, London, 2014, ISBN 978-1-4093-2648-9