Evasion

Ouro Preto : le charme baroque d’une ville coloniale brésilienne

En déambulant dans des rues pavées, pentues à souhait, où chaque bâtisse recèle son brin d’histoire, on a un peu l’impression de se trouver dans un Brésil tropical. D’innombrables églises parsèment un paysage joliment vallonné. A quelque 1.000 mètres d’altitude, le climat est doux, printanier tout au long de l’année. Les brumes matinales sont fréquentes. Les toits aux tuiles rouges et les couleurs vives des maisons rappellent l’héritage portugais. Par Christian Sorand

Le cadre physique et le legs historique font que Ouro Preto a gardé un charme à la fois désuet et envoûtant. L’Unesco l’a d’ailleurs classé site du patrimoine mondial. Mieux vaut prendre son temps pour parcourir à pied cette petite ville coloniale baroque. Il faut surtout avoir de bonnes jambes en fonction du relief escarpé. Certaines rues ont une inclinaison qui avoisine les 75% voire les 80% ! Places monumentales, maisons bourgeoises agrémentées de balcons, églises baroques, fontaines murales, tout cela dans un paysage grandiose, viendront récompenser vos efforts.

Les monts du Minas Gerais : la Serra do Espinhaço

L’état brésilien du Minas Gerais (Mines Générales’) se trouve à l’intérieur du pays entre Rio de Janeiro et Brasilia. Aujourd’hui, Belo Horizonte en est la capitale, à une centaine de kilomètres plus au nord. Ouro Preto l’a été de 1720 à 1897. Elle se nommait alors Vila Rica – la ville riche – car ce qui fait l’opulence de cette région, ce sont l’or et les pierres précieuses recélés par la montagne. Ouro Preto signifie ‘or noir’ en portugais ; non pas cet or noir bitumineux. Les premières pépites étaient tout simplement recouvertes d’une fine couche ferrugineuse de couleur sombre. La toute première pépite fut trouvée entre 1693 et 1698 sur les bords de la rivière Tripui. Alors, quand on a été sûr que c’était bien de l’or pur, cela provoqua une ruée vers l’or du XVIIe au XVIIIe siècle.

Des richesses considérables ont ainsi permis la construction de villes coloniales bâties sur le modèle de la mère patrie d’alors. Car il y a d’autres villes coloniales classées dans cette région : Mariana, Diamantina, Tiradentes, São João del Rei, Congonhas…

Pourtant, Ouro Preto, fondée en 1698, demeure la cerise sur le gâteau. Les mines d’or se sont un peu épuisées, alors la ville s’est tournée vers le tourisme. Pas seulement pour les visiteurs étrangers, mais également pour les Brésiliens, car son histoire revêt une valeur chère au coeur de la nation.

Ouro Preto a tout d’abord été le théâtre du premier mouvement indépendantiste, connu sous le nom de ‘Inconfidância Mineira’. Nourri par les idées des philosophes du siècle des Lumières et l’indépendance américaine, Tiradentes (1746-1792) l’instigateur local de la révolte, prit la tête de ce mouvement en… 1789 ! Les Portugais mirent cruellement fin à cette tentative d’indépendance. Tiradentes a été pendu et son corps sauvagement découpé en morceaux pour jalonner la route de Rio afin de mettre fin à toute nouvelle velléité de révolte. Depuis, Tiradentes est devenu un héros national. On ne compte plus les places du pays qui portent son nom, à commencer par celle d’Ouro Preto, où l’on avait déposé sa tête.

Aleijadinho (1738-1814) est un autre enfant du pays. Sculpteur et architecte, on lui doit de très nombreuses créations baroques, dont le style a d’ailleurs une spécificité appelée ‘Barroco Mineiro’. A l’époque de la colonie, les futurs ingénieurs des mines devaient suivre leurs études à la célèbre université de Coïmbra, au Portugal. Alors, en 1876, on fonda à Ouro Preto, la première École des mines du pays (Escola de Minas) qui demeure un établissement renommé au Brésil.

La richesse minière

A la richesse du patrimoine historique, il faut ajouter un grand potentiel industriel. L’importance et la diversité du sous-sol minier ont fait la fortune d’Ouro Preto. Et si le gisement aurifère s’est épuisé, il n’en reste pas moins que l’abondance des autres réserves minières demeure un atout économique majeur. Belo Horizonte, capitale de l’état du Minas Gerais, est ainsi devenue une ville industrielle de première importance. C’est aujourd’hui la 6ème agglomération du Brésil. L’actuelle présidente du pays, Dilma Rousseff y est née. La région possède d’importants dépôts de fer, de bauxite, de manganèse, de talc et de marbre. Parmi les minerais exploités, hormis encore un peu d’or, on y trouve de l’hématite, de la dolomite, de la tourmaline, de la pyrite, de la muscovite et du topaze.

Il existe même une variété rare de topaze, appelée ‘topaze impérial’, que l’on ne trouve qu’à Ouro Preto. Le Brésil est un grand pourvoyeur de pierres précieuses. Les plus belles améthystes en proviennent. La stéatite, communément appelée pierre à savon est une autre production locale. Sur la petite place qui fait face à l’église Saint François d’Assise se trouve un petit marché local spécialisé dans la vente de divers objets fabriqués avec de la pierre à savon.

Un grand nombre de magasins d’Ouro Preto proposent des échantillons de minéraux, des gemmes taillées en cabochons ou en cristaux. Les collectionneurs y trouveront leur compte. On peut également voir de beaux bijoux exposés dans la vitrine des joaillers locaux. Noblesse oblige.

Les attraits d’Ouro Preto

La ville est devenue le refuge de nombreux artistes. On choisit de séjourner dans une pousada plutôt que dans un hôtel. Depuis un balcon ouvert, on contemple les toits et les clochers qu’abritent ses collines. Nul besoin de climatiseur. Les nuits sont douces et fraîches. Par la fenêtre ouverte, on respire l’air des montagnes. Et au petit matin blême, en admirant la brume qui a envahi la vallée, on se laisse bercer par le doux son des cloches. Quelques musées, beaucoup de belles églises – certaines parées d’or -, de délicieux petits cafés, des restaurants étonnamment variés qui font la renommée de sa table, quelques galeries d’art, des antiquaires, de jolies boutiques qui créent l’envie de chiner, tout cela contribue au charme exquis d’Ouro Preto.

Il vous prend alors l’envie de prolonger votre séjour et de continuer à se perdre dans ses ruelles pavées, où souvent un escalier de pierres tient lieu de trottoir. Un Brésil bien déroutant ; bien réel pourtant. Au balcon de certaines fenêtres, on voit parfois des sculptures métissées, empreintes culturelles et artistiques de ce pays multi racial. Les fleurs tropicales et l’irrémédiable présence des jacarandas, rappellent aussi que l’on est bien en Amérique du Sud.

‘Praça Tiradentes’, la grande place centrale, comporte deux beaux édifices qui se font face. D’un coté se dresse l’élégant ancien palais municipal, devenu musée de l’Indépendance (‘Museu da Inconfidência’). De l’autre, on y voit une grande bâtisse qui ressemble un peu à un fort. Elle abrite le musée des Sciences et Techniques offrant une très belle collection de minéraux et de gemmes. La nuit venue, l’éclairage donne à la place et aux monuments une allure irréelle et superbe. La Casa dos Contos (XVIIIe), autrefois hôtel des impôts, est devenue un musée d’histoire qui retrace la fièvre de l’or. Ses églises – 23 au total – jalonnent monts et vallées. On a déjà évoqué la très belle église rococo Saint François d’Assise (1776), oeuvre majeure d’Aleijadinho.

L’église N.S do Rosario a, quant à elle, la particularité d’avoir une façade arrondie. Toutefois, la beauté du site se découvre au fur et à mesure de promenades terrestres. On pourra toujours trouver un joli petit café pour se reposer et se rafraîchir des efforts de la marche. A ce propos, il existe un lieu véritablement exquis sur la place Tiradentes. Appelé ‘Chocolat Ouro Preto’, on peut y déguster de succulents chocolats faits maison dans un cadre agréable.

Ainsi, Ouro Preto, blottie dans ses montagnes du Minas Gerais, apparaît-elle véritablement comme un lieu d’exception. Lors d’un voyage au Brésil, il serait dommage de ne pas y aller. L’accès reste une démarche volontaire, car l’aéroport le plus proche (environ 120km) est à Belo Horizonte. Petite consolation, la route qui mène aux villes coloniales du Minas Gerais est très belle. Elle traverse des zones de forêts tropicales denses où le feuillage est entrecoupé de multiples variétés d’arbres à fleurs. Certains versants et vallées abritent des fermes et des prés où se plaisent vaches et moutons. On passe également à coté de mines perdues dans la montagne. Et lorsqu’on découvre enfin Ouro Preto, la beauté du site vous saisit à la gorge et on se dit que cela valait bien un détour.

Bibliographie :

A. Ouvrages.
Lonely Planet- Brazil, 9ème édition, Nov.2013.
Bibliothèque du Voyageur Gallimard – Brésil, juin 2011

B. Sites Internet.
http://en.wikipedia.org/wiki/Minas_Gerais
http://global.britannica.com/EBchecked/topic/383491/Minas-Gerais
http://en.wikipedia.org/wiki/Belo_Horizonte
http://en.wikipedia.org/wiki/Ouro_Preto
http://wikitravel.org/en/Ouro_Preto
http://www.v-brazil.com/tourism/minas-gerais/ouropreto.html
http://www.ouropreto.org.br/ingl/historia.asp
http://whc.unesco.org/en/list/124
http://whc.unesco.org/en/documents/108029
http://en.wikipedia.org/wiki/Aleijadinho
http://en.wikipedia.org/wiki/Church_of_Saint_Francis_of_Assisi_(Ouro_Preto)
http://en.wikipedia.org/wiki/Tiradentes
http://www.les-pierres-precieuses.com/La-Topaze-Imperiale-ccbaaaaaa.asp
http://lateliergeant.geant-beaux-arts.fr/atelier-geant/ala-une/1aa-modelage-impression-a-la-une/steatite-912/
https://www.facebook.com/pages/Chocolates-Ouro-Preto/181142365333909