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Au cœur du tramway Hongkongais

L’endroit est inconnu du grand public. Au cœur du quartier de Sai Wan entre Kennedy Town et Sai Ying Pun, un gigantesque entrepôt se dissimule derrière de hautes palissades et c’est un Français qui dirige le site. Paul Tirvaudey nous a ouvert les portes des ateliers du célèbre tramway de Hong Kong, filiale de la RATP depuis plus de 15 ans. Visite guidée.

Propos recueillis par Anne-Claire Poignard

Ce dépôt c’est une usine miniature au cœur de Hong Kong ?

C’est une forme de trésor que les Hong-Kongais eux-mêmes ne soupçonnent pas. Plus de 500 salariés travaillent ici 6 jours sur 7 : des conducteurs, des mécaniciens, des régulateurs. C’est notre centre névralgique avec le poste de contrôle de la ligne et les ateliers où sont construits et entretenus les trams.

Vous fabriquez et entretenez tout de A à Z ?

Oui c’est assez unique. On a 165 rames qui transportent 150.000 passagers par jour, c’est la plus grande flotte de trams à deux niveaux au monde. Cette flotte, il faut à la fois la maintenir en état et la moderniser. Les trams les plus anciens en circulation aujourd’hui datent des années 80. Certaines pièces détachées n’existent plus sur le marché. On ne peut pas se retourner vers des fournisseurs extérieurs en cas de besoin donc on reconstruit nous-mêmes.

L’enjeu c’est aussi de moderniser le réseau ?

Le défi est immense. Chaque année, nous construisons entre 4 et 6 nouveaux tramways. On remplace les structures en bois par des structures en aluminium. Les nouvelles rames ont des technologies de moteur et de freinage à récupération électrique qui permettent d’économiser de l’ordre de 30% d’énergie par wagon. On a aussi mis en place des capteurs avec le projet de trouver des solutions pour identifier des surconsommations électriques ou des comportements de conduite qui ne sont pas vertueux écologiquement pour, à terme, diminuer notre consommation. Cette année, nous avons aussi remplacé presque 1km de rail sur la trentaine que compte la ligne née en 1904.

Comment assurez-vous la sécurité du réseau ?

Tous les trams sont inspectés tous les 8 jours par des techniciens qui vérifient l’état du système de frein notamment. Cela se passe dans des fosses de nos ateliers. Les nouveaux conducteurs, eux, sont formés sur 8 semaines et on les suit sur plusieurs mois. La vitesse moyenne est de 8km/h, c’est lent mais dans une ville comme Hong Kong, la densité de circulation impose d’avoir les bons réflexes.

Le tramway de Hong Kong n’est financé par aucune subvention publique. Les recettes sont issues des titres de transport mais aussi de la publicité ?

La vente des titres ne couvre pas les dépenses de fonctionnement. Les trams sont un support publicitaire très populaire parmi les annonceurs. Ici, on est capable d’habiller 3 rames par demi-journée. Les trams verts peuvent changer de couleur et devenir la vitrine d’une marque en quelques heures. Le savoir-faire est précis : nos techniciens découpent puis collent les panneaux publicitaires de telle sorte qu’il n’y ait aucune bulle, aucune rature.

Ce savoir-faire dont vous parlez est en voie de disparition aujourd’hui ?

La principale préoccupation pour nous en ce moment, c’est de recruter les prochaines générations pour entretenir le tram. On a une population de techniciens qui vieillit avec des gens qui travaillent pour nous depuis 20, 30, 40 ans. Certains sont déjà partis à la retraite. L’enjeu c’est d’embarquer des jeunes dans l’aventure et de leur transmettre l’expertise de ces seniors. Ces métiers, comme dans beaucoup de pays du monde, attirent de moins en moins. Particulièrement dans une ville dynamique comme Hong Kong où les jeunes recherchent davantage des métiers plus confortables financièrement.

Le tram c’est un moyen de transport, c’est aussi un lieu de fête ?

Les amoureux du tramway le savent : ce dépôt c’est le point de rassemblement pour les tram-party. On l’appelle le « triple 8 ». Le 8 étant un chiffre qui porte chance en Chine. C’est là que les conducteurs prennent leur service et c’est aussi là que vous pouvez embarquer pour fêter un événement en famille ou entre amis le matin, en journée ou jusqu’aux douze coups de minuit. Le coût s’échelonne entre 1.400 et 3.500HKD de l’heure.

Les fêtes approchent, le Père Noël a-t-il prévu de passer par le HK Tram ?

Le Père Noel peut tout à fait passer par le HK Tram ! Les trams ne volent pas encore comme les traineaux, cela fera peut-être partie des prochains développements technologiques ! Mais on peut tout à fait inviter le Père Noel et organiser des fêtes de Noel dans les trams. Donc ouvrez l’œil lorsque vous apercevez le « ding ding » !

(Photos Tram : ©HKTram)