A Pu’er, les civilisations du thé et du vin se rejoignent
Point d’orgue de la 8ème Route des vins de Saint- Emilion – Pomerol – Fronsac en Chine, l’inauguration le 9 décembre de l’exposition « Quand les civilisations du thé et du vin se rejoignent » au musée national du Thé de la ville de Pu’er dans le sud du Yunnan, marque une nouvelle étape dans le jumelage initié il y a quatre ans entre la ville de Libourne, les vins de Saint-Emilion- Pomerol – Fronsac et la capitale mondiale du thé.
Par Philippe Dova
A l’origine de cette exposition un phénomène météo assez fréquent en hiver qui avait paralysé le sud ouest de la France « Au mois de janvier 2012, Libourne était bloquée par la neige, j’étais tout seul dans l’hôtel de ville et le téléphone ne s’arrêtait pas de sonner. Au bout d’un moment j’ai décroché ! A l’autre bout de la ligne, Hervé Cayla, directeur général de la société Ozark et conseiller du commerce extérieur à Pékin, cherchait à joindre un interlocuteur à la mairie pour lui faire part de la demande des autorités de Pu’er de créer un jumelage culturel et économique avec une région viticole. Il leur avait suggéré la région du libournais qu’il connaissait et ses interlocuteurs chinois avaient été séduits par l’idée ! C’était donc un rapport improbable, il n’est d’ailleurs pas certain que j’aurais donné suite à cette demande si je n’avais pas eu ce premier contact direct avec Hervé Cayla ! », se souvient Philippe Buisson, maire de Libourne et président de la communauté d’agglomération du Libournais. Séduit également par l’idée, le premier édile la partage avec son homologue du village de Saint-Emilion, Bernard Lauret et le président de l’Union des syndicats Saint-Emilion –Pomerol-Fronsac de l’époque. « Cela fait 25 ans que je viens en Chine et chaque fois que je rencontrais des présidents de sociétés ils m’accueillaient toujours avec le rituel du thé. J’ai toujours été très impressionné et j’ai compris que cela faisait partie intégrante de leur culture comme nous la culture du vin. Lorsque le jumelage a été proposé nous avons tout de suite été enthousiasmés par l’idée et nous sommes organisés pour la concrétiser. », témoigne Jean-François Galhaud, actuel président de l’Union, président du Conseil des vins de Saint-Emilion et propriétaire de Moulin Galhaud. L’accord de jumelage est signé à la fin de l’année 2012 et, grâce notamment au soutien de Madame Sheung Wan Lau, propriétaire du groupe hôtelier Bolian en Chine et du Château de La Rivière à Fronsac, les échanges commencent alors. « Nous avons découvert au fil des voyages qu’il y avait vraiment des similitudes au niveau du vignoble, des cultures des théiers, au niveau de la dégustation et aussi le fait que les thés soient millésimés comme nos vins. Ce sont des produits d’exception ! Les paysages sont fantastiques, ils sont classés au patrimoine mondial de l’Unesco comme les nôtres ! Ce jumelage est un échange de cultures et de traditions millénaires.
Aujourd’hui la Chine s’ouvre à la consommation du vin, cela a commencé par les grandes villes, puis les villes secondaires et demain ce sera l’ensemble du pays qui dégustera nos vins. Mais nous ne sommes pas uniquement là pour faire du commerce, c’est un échange dans lequel nous reconnaissons l’existence d’une civilisation ancienne en Chine. Les Chinois découvrent aussi les atouts touristiques importants de notre région même si c’est avant tout le vin qui fait parler de Bordeaux et notamment de la région de Libourne. », constate Jean-Marie Garde, président du syndicat viticole de Pomerol et propriétaire de Clos René.
Près de dix-huit mois ont été nécessaires pour réaliser l’exposition: plus de trois cents objets ont été collectés, rénovés puis transportés par bateau. Le parcours a été imaginé par une scénographe et l’équipe du Conseil des vins de Saint-Emilion pour rendre le parcours vivant et didactique grâce à une recherche iconographique approfondie dans un espace dédié de 300m2. Le 9 décembre, à l’issue des traditionnels discours inauguraux, la centaine de convives (parmi lesquels une trentaine de viticulteurs, de Libournais et professionnels du vin avaient fait le déplacement à Pu’er) a pu découvrir l’exposition, profiter d’un cocktail alliant vins et thés d’exceptions au son des chants et danses traditionnels des minorités ethniques.
“Cette exposition va durer deux ans. Elle est le symbole d’une nouvelle page que nous allons écrire avec nos amis chinois. En 2017, une délégation de Pu’er sera accueillie dans les vignobles de Saint-Emilion – Pomerol – Fronsac et de nombreux projets sont déjà programmés : une série de vidéos sera produite pendant l’année pour faire des parallèles entre les deux univers, une exposition de photos autour des vins de ces appellations et des thés de Pu’er devrait être organisée à Shanghai, et une conférence dégustation vin et thé se tiendra à la Cité du vin de Bordeaux le 18 mai. Cela fait vingt ans que nous communiquons sur cet ensemble d’appellations, montrons qu’il n’y a pas que les crus classés, qui sont nos locomotives, dans ces appellations. Nous sommes riches d’une multitude de petits châteaux de rapports qualité / prix sensationnels, très accessibles avec en plus des propriétaires sympas, accueillants et qui aiment bien la convivialité ! Nous partageons cela avec nos amis du Yunnan et je pense que cela a joué dans le jumelage.”, conclut Jean-François Galhaud.