Coups de coeur

Windhoek : au creux des hauts-plateaux du sud-ouest africain

Cette ville d’Afrique, encore mal connue, offre quelques surprises agréables. Capitale moderne d’un immense pays – tout aussi inconnu – la Namibie, elle étale une communauté urbaine multiraciale dans une large vallée entourée de montagnes. Voici donc une facette de l’Afrique bien différente de certaines idées reçues.

Par Christian Sorand

Avant d’atterrir au seul aéroport international du pays, le paysage des hauts-plateaux offre une vision, un tant soit peu attendue, d’une contrée paraissant vide de toute habitation. En descendant de la passerelle, la petite aérogare est davantage à l’image d’une infrastructure provinciale qu’à celle d’une capitale. Pourtant, on est d’emblée saisi par une lumière extrême et une relative fraîcheur ambiante. Comme l’aéroport est assez loin de la ville, on a tout le loisir de se laisser ébahir par la verdure et par la beauté du paysage. Puis tout à coup, la route plonge dans une vallée servant d’assise à la ville de Windhoek (environ 270.000 habitants). L’ordre et la propreté d’une cité moderne perpétuent alors la première impression : celle d’une découverte inattendue.

Une cité des hauts-plateaux

Dans cet hémisphère sud où les saisons sont inversées, l’air est pur, plaisant dans la journée et carrément froid la nuit venue. Située à 1655m, Windhoek n’a pas l’apanage de l’altitude. Lhassa au Tibet, avec 3656m et La Paz en Bolivie, 3640m détiennent le record mondial. Sur le continent africain, seules Addis Abeba (Éthiopie) et Asmara (Érythrée), à 2355m, Nairobi (Kenya), à 1795m, Johannesburg (Afrique du Sud), 1753m, devancent Windhoek. Latitude et altitude expliquent donc la fraîcheur du climat, sachant malgré tout qu’ici le soleil brille 300 jours par an !

Selon une tradition locale, l’étymologie de Windhoek proviendrait des sources chaudes se trouvant à proximité. Son nom, dans le dialecte Herero, veut dire ‘’le lieu des vapeurs’’. Car le matin, vue des crêtes du plateau de Khomas Highland, la condensation forme un halo de brouillard au-dessus de la vallée. Windhoek est un mot de consonance afrikaans.

En fait, la ville a été fondée à deux reprises. Une première fois par une tribu locale qui l’a ensuite abandonnée. Une seconde fois, par les Allemands à la fin du XIXe siècle. Le pays a été colonisé d’abord par l’Allemagne en 1884 sous le nom de Sud-Ouest africain.puis par l’Afrique du Sud à partir de 1915. Ce n’est qu’en 1990, sous l’égide des Nations Unies, que le pays est devenu un État indépendant sous le nom de Namibie.

Une empreinte allemande

Si l’anglais est devenu la langue officielle, l’afrikaans et l’allemand sont largement utilisés par la population. La colonisation allemande a laissé des traces indélébiles car beaucoup de descendants des colons d’outre-Rhin sont restés. Windhoek en porte donc des traces visibles.

Il y a d’abord la colline où se dresse la Christuskirche (l’église du Christ), véritable emblème de la ville. Édifiée en 1910, dans un mélange de style néo roman et d’art nouveau, c’est la plus ancienne église luthérienne du pays. Elle est à proximité du vieux fort des forces allemandes, l’Alte Feste (1892), devenu le musée national d’histoire. Le Tintenpalast (le palais de l’encre), datant de 1913, est également tout à côté. Après avoir servi à l’administration coloniale, le bâtiment est devenu le siège de l’Assemblée nationale. Émergeant d’un parc superbe aux essences tropicales, il est le refuge de nombreux oiseaux. Dans la ville basse, le Turnhalle (1909) et la gare ferroviaire (1911) sont deux autres exemples d’architecture coloniale.

Il n’est pas rare non plus de voir un certain nombre de vieilles demeures datant de cette époque. La rue (Heinitzburg Strasse) abrite un ensemble de constructions imposantes édifiées par Willhem Sander et a été surnommée la rue des ‘’châteaux’’. Ce sont les anciennes demeures de la haute société coloniale : Schwerrinsburg (1894), Sanderburg (1911), et surtout Heinitzburg (1908) devenue aujourd’hui un hôtel de luxe appartenant à la chaîne Relais & Châteaux.

Sur Independence Avenue, l’artère principale, séparant la ville en deux parties, un ensemble de bâtiments modernes abrite des boutiques, des cafés et des restaurants. Le style est clairement germanique. Une belle tour de l’horloge, à l’entrée d’une rue piétonne (Post Street Mall), semble être celle d’une ville allemande.

En évoquant l’Allemagne, on ne peut s’empêcher de penser à la bière ! Or, il existait bien sûr une vieille brasserie, transformée maintenant en centre artisanal. The Old Breweries Complex est devenu un lieu de passage obligé pour tous les visiteurs. Il marie le passé colonial à l’artisanat tribal de toute la Namibie. Un agréable café de caractère s’y trouve. Au Craft Café (sur Tal Street), on peut choisir l’origine de son café ou de son chocolat, ou bien déjeuner, après avoir chiné allègrement un souvenir africain.

Ceci nous emmène donc à découvrir l’autre facette de Windhoek, celle de son appartenance à la terre d’Afrique.

L’âme africaine sous-jacente

S’il est presque un peu anachronique d’oublier qu’on se trouve en Afrique au centre-ville, il en va bien autrement dans les faubourgs ; plus encore quand on quitte l’agglomération.

Les contreforts ouest abritent une vaste zone urbanisée connue sous le nom de Katutura. Ironiquement, dans la langue herero, cela veut dire ‘’là où personne ne veut habiter’’ ! Or, il s’agit d’un immense quartier populaire où résident les ¾ de la population africaine de la capitale. La similitude avec les townships sud-africaines caractérise cet habitat issu d’une émigration rurale massive. Cette communauté urbaine offre trois facettes en relation avec les vagues d’arrivées successives. Il y a d’abord un quartier plus ancien constitué de petites constructions modestes, sises dans un ensemble bien établi. Lui succède ensuite une zone moins reluisante faisant figure d’une Afrique plus traditionnelle, restant toutefois assez organisée avec ses commerces, ses bars, ses marchés, et même quelques centres commerciaux. Reste ensuite une ceinture beaucoup plus pauvre, véritable bidonville, où seules l’eau et l’électricité sont pourvues par la municipalité.

La visite de Katutura fait partie du programme de certaines agences touristiques. D’autant plus qu’il y a un vaste réservoir d’eau alimentant toute la zone urbaine de Windhoek. Une partie des rives du lac artificiel a été aménagée pour les loisirs.

Malgré tout, quand on traverse Katutura, on est à mille lieues des autres banlieues cossues qui parsèment les contreforts orientaux de Windhoek, comme Klein Windhoek ou Eros Park.

L’Afrique sauvage aux portes de la ville

D’une manière générale, Windhoek est une petite agglomération très occidentalisée, à la fois propre et agréable. Le centre-ville se visite aisément à pied. La capitale sert souvent de base de départ à une visite du pays. Pourtant, il y a localement quelques belles excursions à faire aussi.

La première est celle du jardin botanique (Windhoek Botanical Gardens). L’entrée est gratuite. Il suffit de suivre les sentiers balisés. Toutes les espèces endémiques de Namibie s’y trouvent. On peut y voir notamment plusieurs types de ‘’quiver tree’’ [Aloidendrun dichotomun], quelques beaux spécimens d’arbres bouteille [‘’Bottle tree’’, Pachypodium lealii], des euphorbes candélabres [Euphorbia candelabrum], et surtout le Welwischia mirabilis, une plante géante du désert du Namib, dont certaines peuvent vivre entre mille et mille cinq cents ans.

Il existe également une très belle réserve naturelle à l’ouest de Windhoek : Daan Viljoen Game Park, dans les montagnes du Khomas Hochland. Il n’y a ni animal dangereux, ni prédateur, ce qui permet d’y voir des animaux sauvages en toute liberté. Il y a en particulier beaucoup de variétés d’antilopes (élands, gnous, koudous, oryx, springboks), mais aussi des phacochères, des zèbres de montagne, et même des autruches et des girafes. Un sentier pédestre permet de découvrir une grande variété d’oiseaux rares.

En Namibie, certaines fermes ouvrent leur porte au tourisme vert, permettant ainsi d’approcher la vie animale d’une autre façon. C’est le cas de Düsternbrook Farm au nord de Windhoek, à l’écart de la route vers Okahandja. L’exploitation possède un pavillon de style lodge où il est possible de passer la nuit, et organise tous les jours un safari dans la propriété. C’est un des rares endroits où l’on peut approcher les guépards et les léopards, dans un espace naturel réservé. Les guépards (cheetah, en anglais) sont une espèce menacée, très protégée en Namibie. Outre un grand nombre de troupeaux d’antilopes, il y a aussi des girafes, et même quelques hippopotames dans un joli lac.

Windhoek est donc bien plus qu’un lieu de passage obligé pour un voyage namibien. D’une part, c’est un bon endroit pour introduire, ou clore, un périple dans ce superbe pays, et d’autre part pour se prélasser avant ou après un safari ou une traversée du désert.

Si les rues se vident le soir venu, la ville bénéficie d’une bonne fréquentation dans la journée, rendant les lieux paisibles et sûrs. Cafés, pâtisseries, centres commerciaux, fast-food, galeries marchandes ne manquent pas au centre-ville. Un petit parc (Zoo Park) offre une halte ombragée et même un café-restaurant avec une véranda extérieure. Il y a aussi quelques musées et des galeries d’art africain. Deux endroits en particulier offrent un beau panorama sur la ville et les environs. Il s’agit tout d’abord d’un immeuble en verre, construit par les Nord-Coréens (Independence Memorial Museum), humoristiquement surnommé ‘’la machine à café’’ ! Le restaurant panoramique de l’édifice possède deux terrasses d’où l’on jouit d’une vue exceptionnelle. L’autre lieu culte de la capitale est l’hôtel Hilton disposant d’un bar panoramique sur la terrasse : lieu idéal pour assister au coucher du soleil.

Il est vraisemblable que Windhoek soit appelé à se développer encore davantage dans un proche avenir, tant il est vrai que la Namibie est un pays d’Afrique ayant le vent en poupe.

Bibliographie

Namibie, Petit Futé, Carnet de Voyage 2016, ISBN : 9782746993853

Liens électroniques

http://www.namibian.org/travel/lodging/daan_viljoen.htm

https://www.duesternbrook.net

Wikipedia

http://www.travelnewsnamibia.com/

https://www.info-namibia.com/

Blog

https://chrismate.blogspot.com/2018/05/