Rubrique Santé

Vive le vent d’hiver ? Vraiment ?

Par Stéphanie Delacroix

Quand vous avez un rhume, un froid (a cold – anglais) / du vent qui est entré (masup angin – indonésien) / tiré le vent (風邪を引く, kaze wo hiku – japonais) / ressentez et émettez (感冒ganmào – chinois) et qu’on vous demande  « t’as une drôle de voix t’es malade ? », vous êtes du genre à répondre :

– Petit un : « – J’ai juste pris froid ça va aller ! »

ou bien

– Petit deux : « – Aaannnaaahh j’suis balade cobbe un chien ! J’ai une rhinopharyngite carabinée j’sais pas cobbent je vais b’en sortir ! ».

Si vous êtes un homme c’est probablement le petit deux. Oui, oui, j’ai bien conscience que cette phrase peut sembler misandre (j’aurais bien dit « misandriste » mais non, l’adjectif de « misandrie » est bien « misandre » !) mais avouez, messieurs, que ce n’est pas complètement faux; Vous supportez beaucoup moins bien les rhumes que mesdames. Les anglophones ont même la notion de « man cold », et figurez vous que des études très sérieuses ont été faites sur ce phénomène.

Les estrogènes ralentiraient la propagation des virus dans le corps des femmes (et les rhumes sont souvent d’origine virale) ce qui expliqueraient qu’elles se sentent moins anéanties ! Une autre explication plus psy du phénomène serait que les hommes se veulent infaillibles et que s’ils sont malades « c’est que c’est grave ma bonne dame ! »

Et une constatation, les femmes réagissent mieux aux maladies à multiples symptômes que les hommes, et les hommes « gèrent » mieux les maladies ou conditions à symptôme unique (bras cassé etc…).

L’expression « malade comme un chien » est aussi intéressante, parce qu’elle existe – manifestement – en français ET en anglais : « sick as a dog ». Jusqu’à récemment quand un chien (qui dormait dehors et travaillait) était assez malade pour qu’on s’en rende compte c’est qu’il était gravement malade et qu’il allait probablement en mourir.

Les Anglais disent aussi « sick as a parrot », malade comme un perroquet ! L’explication est beaucoup moins simple…elle pourrait venir d’une transformation approximativement homophonique de « sick as a pierrot », le personnage de la commedia dell’arte au teint tout blanc, les yeux cernés de noirs et larmoyants. D’Indonésie je vois une autre homophonie (toute aussi approximative)…avoir mal au ventre se dit « sakit (douleur) perut (ventre) »… sakit perut & sick [as a] parrot … pas si loin non ?

Pour dire qu’ils sont souffrants les Indonésiens disent que leur corps n’est pas délicieux (tidak enak badan) et je trouve ça plutôt mignon…les Japonais disent quant à eux qu’une partie de leur Ki (leur énergie vitale en quelque sorte) est mauvaise 気分がわるい (kibun ga warui) bien trouvé aussi ! Les Chinois ont un proverbe intéressant au sujet de la maladie : avant trente ans les hommes provoquent la maladie, après trente ans ce sont les maladies qui cherchent les hommes…Malade se dit « bing » (et bing, j’ai la crève !), idéogramme aussi utilisé en japonais dans de nombreux kanji ayant trait à la maladie.

Comme il ne vous a pas probablement échappé que nous sommes entrés dans une nouvelle année lunaire, l’année du coq j’ai trouvé une expression qui réussi l’exploit d’associer « maladie » et « volaille » sans contenir les mots « grippe » ni « aviaire » : une expression yiddish “quand un homme pauvre mange du poulet c’est que l’un des deux est malade” ! Exploit que j’aurais pu moi aussi réussir si je n’avais pas flanché si près du but…je « couve » peut-être quelque chose !