Toutes taxes comprises à Hong-Kong…
Toute l’équipe de l’émission économique vedette de la Radio Télévision suisse romande s’est déplacée à Hong-Kong pour réaliser une « spéciale » en mars dernier. Une tradition de l’émission créée et produite par Patrick Fischer et Marcel Mione il y a huit ans. « TTC spéciale Hong-Kong » diffusée le 30 mars sur la RTS puis le 5 avril sur TV5MONDE Asie a une fois encore réalisé un record d’audience et permis aux téléspectateurs en Suisse et dans le monde de découvrir Hong-Kong à travers le dynamisme d’une communauté suisse discrète mais bien présente… A l’issue du tournage, Marcel Mione a répondu aux questions de Trait d’Union. Propos recueillis par Philippe Dova
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Trait d’Union : Pourquoi être venus jusqu’à Hong-Kong pour tourner et réaliser TTC ?
Marcel Mione : Chaque année, l’émission réalise une « spéciale » dans une grande capitale financière du monde. Force est de reconnaître que Hong-Kong en est une ! En débarquant de l’Airport Express à Central, il suffit de lever la tête pour constater que la finance est bien présente ! Chaque année l’émission organise par ailleurs un concours boursier qui a beaucoup de succès à l’intention de tout à chacun et des classes d’écoles où les participants sont invités à jouer sur une plateforme boursière comme si c’était réel. La récompense de ce concours était un voyage à Hong-Kong pour la classe gagnante ce qui constituait un autre prétexte pour venir sur l’île !
Quel est le concept de l’émission ?
C’est une émission de prime time chaque lundi après le journal de la RTS. Le concept est celui d’un magazine économique d’information grand public. Il s’agit à 20h15 chaque lundi d’intéresser le plus grand nombre de téléspectateurs. L’émission se veut impertinente, didactique et décomplexée ! La formule que nous avons mise sur pied au début et qui a trouvé très vite un grand succès repose sur un sujet que nous appelons « le dossier » (le journaliste qui réalise le reportage fait une petite intervention au milieu de son reportage ou à la fin), un sujet plus court qui sera davantage dans l’actualité du moment et puis des petites rubriques assez drôles, un peu impertinentes, un peu décalées qui donnent un peu le piment de l’émission…
C’est-à-dire ?
Nous avons par exemple une rubrique qui s’appelle « Charles Edouard » qui est notre banquier genevois très privé… C’est un comédien bien entendu, qui dans son très beau costume de banquier nous donne des leçons d’économie en se réjouissant de tout l’argent qu’il pourra gagner et des bénéfices qu’il pourra tirer de telle ou telle situation…
C’est de la fiction ?
Non, pas du tout, cette petite chronique se veut être très didactique. Elle l’est d’ailleurs tellement qu’elle est utilisée par des enseignants dans beaucoup de classes en Suisse romande auprès des adolescents pour leur faire passer des concepts économiques. C’était le but : apprendre en s’amusant, intéresser le grand public à l’économie sans l’ennuyer.
Qui est ce « grand public » ?
C’est le public du prime time à 20h. Un public très large. TTC est une émission qui fait en moyenne entre 40 et 45% de parts de marché chaque lundi, ce qui représente à l’échelle de la Suisse romande entre 240 et 280.000 téléspectateurs. Chaque lundi nous avons presque un téléspectateur sur deux plus le rattrapage internet sans parler de l’audience hors territoire grâce à TV5MONDE. C’est une émission qui marche bien, c’est la troisième la plus regardée de toute la chaîne.
C’est difficile d’avoir un ton un peu décapant pour parler d’argent dans une émission de télévision en Suisse romande ?
Curieusement je pense que les banquiers aiment bien parfois ce ton là pour parler d’argent. C’est un ton qui change de celui un peu sérieux, ordinaire de l’information économique. Je pense que ça passe bien, en tout cas dans le public et c’est justement parce que nous avons ce ton décalé assez inattendu pour un magazine économique.
Y a-t-il des sujets tabous ?
Non, il n’y a pas de tabou. Nous avons une grande liberté d’action. Ensuite, le grand problème c’est l’accès à l’information. Comme nous sommes une émission de très grand public, les dirigeants des grandes banques ou des grandes industries ne choisiront pas forcément une émission comme la nôtre pour venir délivrer leurs propos. Ils choisiront peut-être une émission économique plus sérieuse pour communiquer.
Votre émission est pourtant très populaire…
Oui mais je ne suis pas certain que les grands dirigeants de notre pays ont comme objectif de s’adresser en priorité au public populaire.
L’émission est-elle en direct ?
Oui.
C’est peut être pour cela que la plupart des grands dirigeants n’y viennent pas…
Effectivement ça peut jouer un rôle parce que c’est en direct… et c’était une volonté de Patrick Fischer.
C’est rare le direct à la télévision aujourd’hui…
Oui mais d’une part c’était une volonté dès le départ de Patrick Fischer qui coproduit et présente l’émission et d’autre part, sur un plan budgétaire, ça ne revient pas plus cher qu’une émission enregistrée et permet de réagir très vite à l’actualité si besoin. En plus nous avons dans chaque émission un invité du monde de l’économie et nous fonctionnons aussi avec des consultants qui nous rejoignent en direct sur le plateau en fonction de l’actualité et des sujets développés.
Comment est née TTC ?
Il y avait un magazine économique dont l’un des deux responsables partait en retraite et il y a eu un essai d’une nouvelle émission qui n’a pas marché. Patrick Fischer et moi avons été à ce moment-
là désignés pour créer un nouveau concept de magazine économique le lundi soir.
TTC c’est une équipe de combien de personnes ?
La rédaction comporte dix personnes.
Qu’y a-t-il dans cette émission spéciale Hong-Kong ?
Il y a deux sujets sur l’horlogerie suisse puisque qu’elle vend 18 % de sa production à Hong-Kong qui représente un formidable magasin pour cette horlogerie. Aviva Fried, la correspondante de la RTS en Chine a fait un sujet sur les contrefaçons parce 95 % des contrefaçons des montres suisses sont fabriquées en Chine, il y a un sujet sur un Gérard Dubois, pâtissier suisse parti de pas grandchose à Hong-Kong il y a 25 ans et success story suisse aujourd’hui, un sujet qui accompagne la classe gagnante et plusieurs petites chroniques.
Qu’est-ce qui vous a le plus frappé lors du tournage de TTC à Hong-Kong ? Par rapport aux idées reçues que vous aviez en arrivant, par rapport à la Chine ?
Ce qui m’a le plus frappé c’est peut être d’un point de vue culturel, combien cette ville est chinoise malgré son passé britannique. Combien finalement les traces de l’histoire sont peu présentes comme si la force de la culture chinoise avait absorbé la culture, l’histoire de l’Occident ici. Bien entendu nous sommes en Chine sans l’être mais je pensais trouver au-delà des trams, plus de traces
de la couronne britannique !
Vous êtes déçu ?
Je suis toujours un peu nostalgique du passé, j’aime bien les villes où l’histoire est présente, comme cela peut être le cas dans de nombreuses villes africaines.
Hong-Kong est considérée comme la porte d’entrée de la Chine, TTC pourrait se déplacer en Chine l’an prochain ?
Oui bien sûr, déjà la Chine en termes de PIB est en train de devenir la première puissance économique du monde devant les États-Unis, il serait donc logique que l’une des prochaines émissions spéciales s’imagine en Chine. Mais ça pourrait être Singapour aussi, grande place financière concurrente de la place financière suisse…
Quels sont les secrets du succès de l’émission depuis huit ans ?
Une information économique à la fois didactique, ludique, décomplexée et une forte cohésion d’équipe. Avec Patrick Fischer nous formons un tandem fort, nous sommes également amis dans la vie…
TTC à Hong-Kong : www.rts.ch/emissions/ttc/6550870-ttc-a-hong-kong.html