Événement

Pékin : première exposition de Fu Xiaojie à YISHU 8

Par Philippe Dova

Le centre de recherche sino-français sur la culture et l’art “YISHU 8” est à Pékin ce que la Villa Medicis est à Rome. Depuis 2011, le Prix YISHU 8 permet à trois jeunes artistes français sélectionnés par un jury de professionnels et de collectionneurs de séjourner dans des conditions exceptionnelles dans l’ancienne Université francochinoise de la capitale chinoise, fondée en 1920 par Sun Yat-sen. En mars 2013, avec le soutien de la Fondation d’entreprise Hermès, la maison YISHU 8 a ouvert son programme de residence à la jeune création chinoise en partenariat avec la Central Academy of Fine Arts à Pékin. Un dialogue culturel et artistique unique entre la Chine et la France. Lauréate du prix YISHU 8 2015, la jeune artiste chinoise FU XIAOJIE, étudiante en Master au département d’art expérimental à l’Académie centrale des Beaux-arts de Chine,présente depuis le 9 janvier l’exposition de ses œuvres « L’ancienne demeure de mon épouse ». Des œuvres dans lesquelles Fu Xiaojie cherche à explorer, par l’utilisation de formes mystérieuses et d’espaces singuliers, les liens qui unissent, chez l’Homme, vie intérieure et environnement extérieur. Le nom de l’exposition est directement inspiré de sa période de résidence à Yishu 8, l’artiste l’a expliqué le jour du vernissage.

“ Cette courte période de deux mois passés en résidence à YISHU 8 m’apparaît comme un voyage où des paysages splendides alternent avec des buissons d’épines.

Pendant la résidence, je tentais de donner une nouvelle impulsion à un ancien projet intitulé « Zhong Kui Alpha », un personnage de Zhong Kui monstrueux, conçu pour une maison hantée, un héros crépusculaire capable de captiver tous les regards. Mais ayant du mal à m’adapter rapidement aux nouveaux matériaux et aux nouvelles combinaisons, je dépensais là une bonne part de mon temps, sans pour autant parvenir au résultat souhaité. La lutte entre langage artistique et ressenti personnel me plongeait dans des états de contradiction et de grande confusion. De fait, c’est parce je forçais mon « intime ami » crépusculaire, parce que je le poussais sous les yeux du public qu’il m’a abandonné. Lorsque je me suis retirée en moi, tout devint clair. Sur une base blanche, immaculée, je discernais des formes, certaines concrètes, d’autres abstraites, et comme par le passé, je pouvais à nouveau dialoguer directement avec les couleurs. Mais il y avait également quelques différences ; mon expérience de licence m’avait appris à briser les limites spatiales, les études à l’Académie m’avaient enseigné comment m’extraire du carcan temporel, et les tableaux latents qui circulaient dans mes veines palpitaient à présent devant mes yeux.

Je me remémorais alors lentement les premières impressions qui avaient accompagné mon entrée dans cette ancienne bâtisse chinoise. Elle ressemblait à une femme d’un certain âge, chargée d’histoire mais qui n’est pas d’humeur à vous en entretenir, gardant l’air mystérieux de ceux qui ont connu le monde. Des gens sont venus dans ce lieu, puis l’ont quitté. Des événements se sont déroulés ici, puis ont pris fin. La lumière du soleil pénétrait par les vieilles fenêtres délabrées et se répandait sur le sol luisant, comme pour m’attirer au cœur du souvenir. J’ai pensé un temps reproduire ces fenêtres, puis je me suis aperçue que, plus encore que les fenêtres elles-mêmes, c’était la marque qu’elles imprimaient dans mon esprit qui m’envoûtait. Je veux retrouver cette trace. Cette trace, c’est à la fois « elle » (Yishu 8), et moi. J’ai médité longuement et intensément pour trouver son nom mais en vain. Je le sais désormais. Elle s’appelle « Mon épouse ».

jusqu’au 15 février : “La demeure de mon épouse”
Yishu 8 (Former Sino-French University), N°20 (jia), Dong Huangchenggen Bei Jie, Dongcheng district, Beijing 100010
北京市 东城区东皇城根北街甲20号 (原中法大学)
Tel : +8610 6581 9058 – www.yishu-8.com