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Palli Palli* ! (« vite vite »)

Je suis étonnée que les Sud-Coréens n’aient pas encore décroché de médaille olympique en course de vitesse… parce que je peux vous dire que lorsque le feu passe au vert pour les piétons, les Séoulites sont capables des meilleurs départs de course pour traverser les artères de la ville.

Par Perrine Tavernier

C’est aussi à cela que l’on reconnaît les newbies de la mégalopole. Ils flânent tranquillement et se retrouvent à attendre 15 min que le feu passe au vert pour traverser une rue. Il faut dire que les daero de la ville sont souvent gigantesques et comptent parfois 10 voies de circulation, donc les feux de signalisation sont longs.

Il y a un autre moment de la journée où c’est la course : à l’heure du départ pour l’école. Vous me direz que cette situation est internationale. La différence, c'est qu’en plein hiver à Séoul, il faut prévoir le temps de s’équiper avant de sortir : bonnet, gants, écharpe, doudoune intégrale, chaussures fourrées et, dans les grands moments, chaufferettes dans les chaussures, les poches, le dos (je rappelle que la semaine prochaine, on atteindra les -17 degrés Celsius). Et puis, nous portons encore le masque à l’intérieur. Ainsi, lorsque nous arrivons au pied de l’établissement scolaire, nous devons le mettre : l’enfiler sous un bonnet avec des gants n’est pas des plus aisés. Enfin, il y a des discussions en cours pour retirer le masque en Corée du Sud. Je serai si heureuse pour mes enfants quand ils pourront enfin voir les visages de leurs camarades et de leurs professeurs. On a beau avoir changé de pays, mon fils cadet n’a jamais connu l’école à visage découvert.

Mais, en ce qui me concerne, je garderais bien le masque le matin. Je ne sais pas si c’est l’hiver qui me ratatine ou si c’est le passage des 40 ans qui n’a pas aidé, mais au réveil, je ressemble à un Sharpei, alors je suis bien contente de camoufler tout cela. Sans compter que sous ma doudoune, je suis en pyjama au moment de déposer mes fils. En France, j’avais cette habitude d’aller chez mon boulanger tous les dimanches matin, presque en robe de chambre et en chaussons. Je crois que tous les boulangers de Paris connaissent les habitants de leur quartier au saut du lit. Depuis que je ne travaille plus, j’ai généralisé cette habitude à tous les jours de la semaine, sauf que maintenant ce sont les professeurs du Lycée Français de Séoul qui me voient en pyjama sans le savoir (et je suis sûre de ne pas être la seule…) Haaaaa, les Français !

Je généralise le phénomène aux Français parce que je ne suis pas sûre que ce soit le genre des Coréens de sortir en pyjama et encore moins celui des Coréennes. Je ne sais pas comment elles font, mais les femmes coréennes sont élégantes en toutes circonstances. Elles prêtent attention à leur apparence. J’en veux pour preuve l’accumulation de trousses de toilettes disposées dans des casiers que l’on trouve dans les commodités de certains bureaux.

Les mauvaises langues diront qu’il y a beaucoup de chirurgie esthétique en Corée du Sud.

Certes, mais on est loin des stéréotypes californiens, donc chirurgie esthétique ou pas, les femmes coréennes sont belles.

En revanche, certaines choses sont pleinement assumées et des questions resteront à jamais sans réponse : quelle est cette tendance à mettre un énorme bigoudi dans ses cheveux en plein milieu du front quand on se promène dans la rue ?

Autre sujet source d’énigmes non résolues : les appartements coréens. Dans la grande majorité des cas, on trouve dans les salons une sorte de grand totem blanc agrémenté de trois disques argentés. Cette tour est en réalité un climatiseur. Ce n’est pas faute d’avoir des faux plafonds dans lesquels est dissimulé un éclairage indirect, mais il n’a pas été jugé nécessaire d’y intégrer le système de climatisation. Idem pour les interrupteurs électriques. Normalement, on place les va-et-vient à proximité des portes. En Corée, c’est différent, ma cuisine est passante avec deux portes qui permettent l’accès à la pièce. Mais une seule porte est pourvue d’interrupteurs à côté. Si bien que tous les jours, je me fais une petite partie de colin-maillard pour tenter de trouver la lumière de la pièce.

Je pourrais aussi vous parler des entrées coréennes possédant d’innombrables placards à chaussures. Je me souviens m’être demandée ce que l’on allait faire de toute cette place perdue…

Mais ce dernier point est aussi l’occasion pour moi de prendre conscience de mon adaptation, car je ne vous fais pas de dessins, à l’heure où j’écris, tous les placards à chaussures sont archipleins !

*injonction qui résume le rythme de vie frénétique des Sud-Coréens, toujours tendus vers un objectif, foncièrement impatients

Illustration : @audrey.desjardin « Souvenir du palais de 경복궁 – Gyeonbokgung palace ».

Ma playlist

Artiste : Nicolas Maury

Album : La porcelaine de Limoges

Titre: Gentleman