Les spiritueux français à la conquête du marché hongkongais
Interview croisée de deux importateurs français et du directeur de Business France.
Propos recueillis par Anne-Claire Poignard

Ils ont installé leur entrepôt au 12e étage d’une tour de Hong Kong dans les Nouveaux Territoires. Valentin Maurel et Charles Soulisse Plou sont importateurs en vins et spiritueux. Descendants de familles de vignerons sur plusieurs générations, ils se sont rencontrés par un ami commun et se sont associés en 2015 pour créer Vines & Terroirs. « On fête nos 10 ans cette année ! » sourit Valentin Maurel.

Dans les caisses qui s’empilent du sol au plafond : des rosés de Provence, des vins de Bourgogne mais aussi depuis 3 ans des spiritueux. « Quand on est arrivés ici, on était spécialisés dans les rosés. Les gens disaient qu’on était un peu fous parce que personne ne faisait du rosé à Hong Kong et puis la demande a explosé. On a remarqué la même tendance sur la tequila. On s’est dit, on va essayer et on verra ce que ça donne. Cela nous a ouvert la catégorie des spiritueux. Petit à petit, on est allés chercher du gin, de la vodka, du whisky. Les spiritueux aujourd’hui c’est la moitié de notre chiffre d’affaires ».
Baisse des taxes
Signe que la tendance est là, les spiritueux sont précisément à l’honneur cette année dans le cadre du French GourMay et ce n’est pas un hasard. « En octobre dernier, les autorités de Hong Kong ont annoncé une baisse des taxes sur ces alcools qui jusqu’ici étaient très fortement imposés », explique Bertrand Quevremont, le directeur de Business France. « Au-delà de 200 HKD, le niveau de taxation passe de 100% à 10%. On a voulu en profiter pour promouvoir les spiritueux français dans toute leur diversité. Le but c’est de mettre en valeur ces alcools dans les bars et dans les restaurants qui participent au festival pour les faire connaître et drainer du public ».

Le potentiel de Hong Kong
Si à l’échelle de la Chine, Hong Kong est un marché évidemment plus modeste, Bertrand Quevremont en est convaincu : « Il y a un terrain à exploiter. Ici il y a une vie la nuit avec beaucoup de bars à cocktails qui se développent. Beaucoup sont dans les fameux classements 50 Best, les restaurants sont dans les classements Michelin. C’est cela qu’il faut aller chercher ». C’est aussi le pari des associés de Vines & Terroirs. « Le pouvoir d’achat à Hong Kong est beaucoup plus important qu’en France. Il y a plus d’étoilés Michelin que de McDonald’s ! Les gens sortent. 9 bouteilles sur 10 sont consommées dans les bars, les restaurants, les hôtels » détaille Valentin Maurel. « Je pense que Hong Kong stratégiquement pour nous est aussi une bonne base pour se développer dans le sud de la Chine et en Asie. On a lancé nos marques récemment en Thaïlande, on va les lancer au Vietnam et en Indonésie » ajoute Charles Soulisse Plou.
Faire découvrir des nouveautés
Pour soutenir la filière, Busines France organise une quarantaine d’opérations dans le cadre du French GourMay. « Il y a d’abord les French markets où les importateurs peuvent directement présenter leurs produits aux consommateurs. Il y en a eu un à Central début mai, il y en aura un second début juin dans les Nouveaux Territoires. On a aussi des partenaires qui organisent des formations, des dîners vins ou spiritueux » détaille Bertrand Quevremont.

L’objectif pour les importateurs c’est aussi de donner envie aux restaurateurs d’utiliser les spiritueux dans leurs recettes. « En ce moment, on travaille sur les produits corses avec les liqueurs et des vermouths. On fait des promotions dans différents établissements autour de ces produits-là. On vient de livrer la cheffe du Gaddi’s Peninsula qui fait des plats à partir de liqueur de cédratine. Je n’aurais pas imaginé cela ! » se réjouit Valentin Maurel.
Le festival vise aussi à faire découvrir des nouveautés. « On a par exemple un French saké produit en Camargue. Il faut expliquer au public l’histoire de ces spiritueux pour donner envie de goûter » ajoute Bertrand Quevremont.
Pour les deux associés de Vines & Terroirs, promouvoir les alcools français c’est une fierté. « Quand on a commencé, personne ne croyait à notre projet. Plein de portes se sont fermées. Aujourd’hui, on est heureux de mettre en valeur nos racines en Provence et en Vallée de la Loire à l’autre bout du monde. C’est joli de se battre pour son pays et puis les bonnes choses sont toujours bonnes à savourer ».