AGORIZE, la crise stimule la créativité
Depuis sa création en 2011, la plateforme française Agorize construit des ponts entre les entreprises et les créateurs d’innovation, en mettant en place des concours (plus de 2.000 à ce jour) permettant de solliciter les idées de chacun. A Hong-Kong, où est installé le siège Asie-Pacifique, la crise actuelle a suscité un recours à l’innovation et à la créativité pour trouver des solutions, en misant notamment sur l’intelligence collective. Rencontre avec Aurélie Wen, CEO d’Agorize APAC.
Propos recueillis par Isabelle Chabrat
Trait-d’union : Pouvez-vous nous expliquer comment fonctionne un concours d’innovation, et le rôle de la plateforme comme accélérateur ?
Aurelie Wen : Un challenge Agorize, c’est généralement un concours de 3 à 5 mois qui se déroule à 90% en ligne. Les participants forment des équipes, collaborent puis soumettent leur solution pour répondre à un challenge proposé par une entreprise. La plateforme en ligne remplit plusieurs fonctions : rapprochement entre les participants, collaboration, mentorat et vote. Nous organisons pour finir une journée de démonstration et une cérémonie de remise de prix récompensant les gagnants.
Quelles sont vos catégories de répondants et comment les sélectionnez-vous ?
Nous avons un réseau d’1,2 millions d’innovateurs en Asie, incluant startups, étudiants, développeurs, designers, et employés de nos clients. Nous sélectionnons les bonnes universités, incubateurs, accélérateurs et réseaux de développeurs en fonction de la thématique. Nous nous appuyons ensuite sur ces relais pour promouvoir nos challenges et ainsi attirer les participants les plus pertinents.
Comment sont incubées les solutions, et combien l’ont été à ce jour ?
Une fois le challenge terminé, les deux à cinq solutions qui ont remporté le concours sont ensuite reprises par l’entreprise, qui va soit les incuber dans son « lab » ou au sein de ses unités opérationnelles. Le but est de produire une preuve de concept (proof of concept). Si le concept fait ses preuves, l’entreprise va ensuite créer un prototype (minimum viable product). Il sera d’abord testé à petite échelle, amélioré, re-testé, de nouveau amélioré, etc… pour finalement être déployé à grande échelle pour un lancement officiel sur le marché. En neuf ans, ce sont plus de 3.500 solutions qui ont été incubées par nos 300 clients.
Avec la crise sanitaire actuelle et la mise à l’arrêt d’une partie de l’économie, vos clients se posent-ils la question du monde de demain ?
Toutes les entreprises se posent cette question et tentent de prédire les futurs besoins et comportements de leurs clients, et d’une manière générale, les impacts de cette crise sanitaire sur les aspirations de chacun. Les problèmes identifiés tournent beaucoup autour de la santé, la durabilité, l’environnement, et l’inclusion.
De même, est-ce que des organisations publiques cherchent à tirer les conséquences de la crise du covid-19 et mettre en place des solutions pour rendre le fonctionnement de leur communauté plus résilient ?
Absolument ! Nous collaborons étroitement avec les organismes parapublics de Hong-Kong, Singapour, du Canada et de la France. En trois mois, nous avons déjà lancé six initiatives autour du covid-19 qui ont attiré plus de 5.000 participants de 120 pays. Et plusieurs autres sont à venir dans le courant de l’année.
Les concours d’innovation intègrent-ils uniquement un angle économique, ou bien également une dimension sociale comme source de progrès ?
Depuis 2 ou 3 ans, nous voyons de plus en plus de challenges intégrer les objectifs de développement durable de l’ONU. Innover c’est bien, mais encore plus si cela bénéficie à la société au sens large. Les entreprises ont compris qu’il ne s’agit plus seulement d’acquérir de nouveaux clients, mais d’être utile à la société.
Dans le monde d’après il y a aussi le changement climatique. Est-ce une préoccupation de vos clients ?
En effet ! On parle beaucoup de la « triple performance », en fait être une entreprise profitable qui a également un impact positif sur l’environnement et la société. Nos challenges incorporent de plus en plus cette triple dimension afin de faire émerger des solutions plus durables.
Pouvez-vous partager l’un de vos succès ?
Alchemy Foodtech a remporté le 1er prix de 200.000 $ singapouriens lors du concours Slingshot 2018. Cette startup a développé un additif qui réduit le taux de glucose dans le sang dans le but de combattre le diabète. L’année suivante, elle a levé 2,5 millions de dollars singapouriens. En début d’année, la startup a annoncé 20 partenariats signés avec des groupes alimentaires locaux et internationaux pour codévelopper des produits qui réduisent l’indice glycémique.