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Hommage à Paul Andreu

 

Décédé brutalement le 11 octobre dernier, Paul Andreu laisse une œuvre considérable derrière lui. Il avait dessiné de nombreux aéroports dans le monde dont celui de Roissy- Charles-de-Gaulle et réalisé notamment l’arche de la Défense, monument emblématique du quartier d’affaires parisien. Architecte et polytechnicien, il était connu et reconnu au delà des frontières hexagonales pour ses réalisations aux quatre coins de la planète et particulièrement en Chine où un musée lui sera prochainement consacré.

Par Philippe Dova

Du Grand théâtre national de Pékin à l’Oriental Art Center de Pudong en passant par l’opéra de Jinan ou l’aéroport de Shanghai Pudong, la Chine ne compte plus les réalisations iconiques signées Paul Andreu. Architecte de renommée internationale, écrivain, peintre depuis quelques années, Paul Andreu faisait partie des personnalités françaises les plus reconnues et respectées dans l’empire du Milieu.

En 2017, sa première exposition « Dialogue avec le papier » à Yishu 8 à Pékin avait connu un grand succès. À 80 ans, l’architecte continuait à développer des projets en Chine: l’aménagement urbain à vocation culturelle et commerciale du centre de l’île de Hengqin à proximité de Zuhai en association avec Thomas Coldefy & Associés et la revalorisation de Yi Yuan, village natal du mécène culturel Dong Fangiun sur « l’île des Fleurs de Pêchers » dans la province rurale du Shan Dong où un bâtiment emblématique signé Paul Andreu devrait prochainement voir le jour. Bouleversé par l’annonce de la disparition de son ami français, Dong Fangiun a décidé de transformer la maison de son enfance dans ce village en « musée Paul Andreu » où l’ensemble de ses œuvres seront réunies.

Christine Cayol, fondatrice de Yishu 8 à Pékin avait pour sa part invité Paul Andreu à participer au forum culturel franco-chinois le 17 septembre dernier à Xian « Il avait exhorté la Chine à inventer un nouveau langage des villes comme l’Europe l’avait fait à la Renaissance. Son exposition à Yishu 8 avait profondément marqué les esprits de nos amis chinois et les dernières œuvres qu’il a peintes sont d’une beauté déchirante, en particulier deux œuvres vertes, signes d’espérance et du renouveau permanent. Paul Andreu était pour moi l’un des derniers grands hommes de culture que j’ai eu la chance de connaître” témoigne émue la philosophe. “Je me souviens d’avoir ressenti une rare et très belle émotion la première fois où je suis entré au Terminal 2F de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle en voyant cette nef, cette très belle structure. Paul Andreu était l’héritier des grands bâtisseurs des trente glorieuses comme Henri Bernard qui avait construit la maison de la Radio à Paris. Roissy 1 est dans cette lignée et restera sa plus grande œuvre parce que c’est la plus conceptuelle notamment dans le fonctionnement, l’idée des satellites a été reprise dans le monde entier ! C’était pour moi un architecte de tout ce qui était à l’échelle de la globalisation avec au-delà de la partie architecturale, la capacité de l’ingénieur polytechnicien à gérer des fonctionnements de flux liés à la grande échelle comme au théâtre national de Pékin. À Séoul, il avait imaginé le master plan de l’aéroport. Paul Andreu était connu pour construire des bâtiments de très grande échelle et avec la Chine, il avait trouvé un pays à la bonne échelle de ce qu’il savait faire » souligne l’architecte David-Pierre Jalicon, PDG de D.P.J. & Partners Architecture à Séoul et président de la Chambre de commerce franco-coréenne en Corée du Sud.

« Travailler avec Paul, c’était impressionnant ! Il était très concerné par les fondamentaux de l’architecture avec en permanence le souci du bien être de l’individu dans son environnement. C’était un humaniste qui voulait être certain de réaliser quelque chose de fondamentalement positif, ne pas uniquement répondre aux besoins techniques et économiques mais laisser quelque chose de bien pour tout le monde. Lors de nos réunions, Paul nous impressionnait toujours avec des croquis qu’il dessinait dans son carnet. C’était sa façon de réfléchir. Ses croquis étaient artistiques et chaleureux, surtout en Chine où tout le monde utilise le digital… », se souvient Zoltan Neville directeur design et développement international du cabinet Coldefy et Associés à Shanghai. (NDLR : « Dans tout ce que je fais y compris dans les dessins d’architecture, je tiens à dessiner à la main et pas à l’ordinateur parce que parfois la main va plus vite que la tête, la tête la rattrape. C’est une espèce de jeu entre la tête et la main, une sorte de rétroaction, l’un poussant l’autre. L’ordinateur est desséchant à côté de ça… », expliquait Paul Andreu lors de l’inauguration de son exposition « Dialogue avec le papier à Pékin en juin 2017) « Toute l’équipe au bureau est choquée et très triste. En même temps nous sommes très fiers et très reconnaissants d’avoir travaillé avec lui. Nous allons continuer notre projet en restant fidèles à ses réflexions et à ses valeurs » conclut l’architecte, relayant en ses termes le message écrit le 11 octobre sur Instagram par Thomas Coldefy : « Good bye Paul Andreu depuis la Chine que tu affectionnais tant je rends hommage à ton œuvre, ta passion et ton engagement que je poursuivrai dans notre projet commun. R.I.P. »