Tranche de vie

Au planning de mon « déconfinement », je rêve de…

Ça y est, en France, nous avons une date de « déconfinement », elle est bloquée dans l’agenda: le 11 mai ! Que se passera-t-il exactement ce jour-là ? Cela reste encore un peu mystérieux… Personne ne le sait vraiment. Des questions se posent. Dont une majeure, récurrente: que faire alors en premier ?

Par Delphine Kahn (depuis la France)

 

Expat de retour de Hong-Kong en France, pour moi une chose est certaine, je vais me booker un tour du monde en famille pour l’année prochaine, prendre un abonnement à l’opéra, réserver dans cinq restaurants par soir avec des copines et partir en randonnée à travers la France après avoir fait une méga fête en famille à la campagne…..

Mais au planning de mon “déconfinement”, je compte surtout profiter de chaque instant ! Et me prend à rêver d’entrer dans un métro bondé aux heures de pointe, me coller aux autres, sentir la transpiration, patienter un peu s’il a deux minutes de retard, me plonger dans mon journal gratuit. Quel bonheur ! Aller faire mes courses au supermarché juste parce que j’ai oublié le beurre, errer dans les allées, regarder les promos, croiser des personnes avec le sourire, discuter avec certaines, aider la vieille dame à attraper le paquet de pâtes tout en haut, faire la queue à la caisse, sourire à la caissière.

Tout ça sans attendre derrière 20 personnes dehors avant de rentrer, le top !

Prendre la route dans les embouteillages pour cinq heures de voiture.

Direction la campagne (ça marche aussi avec la mer ou la montagne) avec deux filles ayant envie de faire pipi au bout de deux kms. Faire la queue au péage, m’arrêter dans des stations-service bondées pour acheter un mauvais sandwich mayo, écouter Henri Dès en boucle et arriver exténuée mais heureuse.

Aller au Mc Do (euh non, faut pas pousser !) ou au Flunch (Ah oui, ça OK).

Hésiter entre le poisson pané et le steak haché, me resservir cinq fois de légumes, voir les enfants enchaîner des assiettes de frites et des glaces fluos et terminer par un mauvais café. Tellement génial !

Accompagner ma fille à l’école sous une pluie battante.

Enchaîner avec ma cadette à la crèche en la traînant sous mon parapluie. Rentrer trempée mais libérée (eh oui, je sais…).

Pédaler sur mon vélo en salle de sport, transpirer sur un elliptique avec dix inconnus.

Parler à un coach sans écran intermédiaire, suivre des cours d’abdos-fessiers sur une musique jouée à tue-tête, ne pas comprendre pourquoi ma voisine enchaîne son 15ème crunchs quand j’ai déclaré forfait au 8ème, avoir des crampes dans les cuisses et des courbatures pendant une semaine, mais savourer ce moment partagé.

Aller au cinéma, payer plein tarif car j’ai oublié ma carte, me retrouver assise à côté d’un dévoreur de popcorns.

Et ne pas réussir à lire les sous-titres car un homme de deux mètres s’est assis juste devant moi cinq minutes après le début. Sortir en faisant semblant de ne pas avoir pleuré à la fin, de tristesse ou de joie.

Prendre l’avion coincée entre un enfant de deux ans et un ronfleur.

Dévorer mon plateau repas avec macédoine de légumes, vache-qui-rit et quatre-quarts encore à moitié congelé. Trembler dans les turbulences et serrer les fesses à l’atterrissage. Attendre ma valise qui arrive en dernier.

Prendre le RER B, puis le metro, puis le bus pour arriver chez moi le cerveau rempli de beaux souvenirs.

Enchaîner des réunions de deux heures avec des collègues que je vois “en vrai”.

Me dire que cela pourrait être bouclé en une heure, que j’ai plein de dossiers sur lesquels je dois avancer et que la pause déjeuner arrive mais entendre les questions sans crépitement, ni oreillettes, ni coupure de wi-fi.

Aller chez le dentiste (si, si, et même chez le gynéco).

Attendre dans la salle avec six autres patients qui doivent passer avant moi, me désosser la mâchoire, avoir la chair de poule en entendant la roulette et boire de travers pendant tout l’après-midi. Mais bénir mon dentiste de m’avoir reçue.

Désherber toutes les mauvaises herbes qui ont envahi la maison de campagne familiale.

Se retrouver en famille, réunis. Attraper des coups de soleil, avoir mal au dos, mal aux mains mais recommencer le lendemain. Puis savourer les tomates fraîchement cueillies, admirer et sentir les fleurs multicolores, marcher pieds nus dans l’herbe fraîche, et observer les limaces apprécier les salades vertes.

Bref, une série de petits bonheurs quotidiens, pas forcément évidents il y a quelques mois mais dont chaque seconde deviendra désormais source de joie.

 

Et vous, que ferez-vous ?