Hong Kong

Voiles noires dans le « Port parfumé »

La nouvelle de la disparition de René Aicardi s’est répandue comme une trainée de poudre dans le « port parfumé », plongeant un grand nombre de membres de la communauté française de Hong-Kong et ses amis des quatre coins du monde dans une profonde tristesse. Responsables politiques de tous bords, personnalités ou anonymes, tous ont voulus partager leur émotion pour que le souvenir de René Aicardi reste bien vivant. Hommages à un grand homme.

Par Philippe Dova et Catya Martin

Chers Compatriotes de Hong-Kong et Macao

Nous avons appris la bien triste nouvelle du décès, en France, de René Aicardi, Conseiller consulaire à Hong-Kong et Macao. Ancien professeur de lettres au Lycée Français International “Victor Segalen”, René Aicardi était un membre reconnu et très actif de la communauté française de Hong-Kong et Macao. Nous nous souviendrons de toutes les actions qu’il a menées avec l’énergie qu’on lui connaissait au service de ses compatriotes. Nous nous souviendrons également de son lyrisme, de son amour pour la langue française qu’il défendait avec passion et de son attachement pour Hong-Kong où il aurait d’ailleurs souhaité terminer ses jours.

Depuis plus de trente ans, René Aicardi s’était investi avec constance et dévouement au service des communautés françaises d’Asie du Nord Est. Fin connaisseur de la région, ayant enseigné à Pékin puis à Taipei avant de s’installer et de prendre sa retraite à Hong-Kong. Régulièrement au contact des communautés françaises dans l’ensemble de l’Asie du Nord Est, René Aicardi connaissait parfaitement la complexité et la diversité des défis que rencontrent les Français à Hong-Kong, en Chine continentale mais aussi au Japon, à Taiwan et en Corée du Sud. Il avait mis ses connaissances au service de la communauté française d’Asie en la représentant à l’Assemblée des Français de l’étranger de 1983 à 2012 puis comme Conseiller consulaire.
Dans un esprit constamment constructif, René Aicardi s’efforçait d’améliorer la vie de nos concitoyens, apportant des conseils, offrant sa médiation, favorisant avec efficacité un esprit de solidarité au sein de la communauté française de Hong-Kong et Macao, l’une des plus importantes d’Asie. Qu’il s’agisse de venir en aide à des Français en difficulté (il avait milité à Hong-Kong pour la création du Fonds associatif de solidarité), de mobiliser le tissu associatif, de soutenir des familles pour la scolarisation des enfants ou de participer à des événements ou des visites bilatérales favorisant le développement des échanges entre la France et Hong-Kong, René Aicardi a toujours montré un engagement sans faille.

S’il est un sujet qui lui tenait particulièrement à cœur, en tant qu’ancien professeur, c’est le soutien aux établissements scolaires français, afin qu’ils puissent accompagner dans les meilleures conditions la croissance rapide de nos communautés dans cette région du monde. Bien connu des  acteurs de l’enseignement scolaire français à l’étranger, tant au sein de l’administration française qu’au sein des lycées français de la région, René Aicardi était à l’écoute des enseignants et des parents, notamment ceux rencontrant des difficultés financières. Il apportait une importante contribution au développement de l’offre scolaire française à l’étranger. Le temps et l’énergie consacrés par René Aicardi au Lycée français de Hong-Kong, en particulier, ont été précieux, dans un contexte de très forte croissance de la communauté française et donc de forte pression pour la scolarisation des jeunes Français de Hong-Kong.

René Aicardi nous a quittés au terme d’un long et courageux combat contre la maladie. Il y a quelques semaines encore, il espérait pouvoir revenir à Hong-Kong et y revoir ses amis.

A quelques proches, il avait adressé il y a peu ce message, qui résume l’homme de cœur et de lettres qu’il est resté jusqu’au bout :
“Fin de parcours semblable à son commencement.

J’ai continué jusqu’au dernier souffle avec la même exigence obstinée, le même espoir d’amour.
Fin de partie semblable à son commencement.

Merci pour votre présence constante et solidaire auprès de moi pendant toutes ces années de fraternité sans frontière…
Vous êtes restés dans ma pensée jusqu’au bout pour tisonner mes battements de coeur au service, toujours et partout, des valeurs que nous n’avons cessé de partager tout au cours de notre engagement militant indomptable en faveur de nos « Frères humains »…”

Plus que tout autre, René Aicardi aura contribué à instiller dans la communauté française de Hong-Kong et Macao un esprit transpartisan, dépassant les clivages politiques pour rassembler ceux qui souhaitaient œuvrer au bien de toute la communauté. Sa contribution au sein du Conseil consulaire de Hong-Kong et Macao aura été à cet égard exemplaire. René est pleuré aujourd’hui par ses amis de toutes tendances politiques et je ne doute pas que ses successeurs auront à cœur de poursuivre l’œuvre de René dans le même esprit. René Aicardi sera remplacé au sein du Conseil consulaire par l’une des personnalités figurant sur sa liste, à qui nous apporterons tout notre soutien pour l’exercice de sa mission.

Tous les agents du consulat général de France à Hong-Kong et Macao adressent à la famille de René Aicardi et à ses amis leurs plus sincères condoléances. Très cordialement à vous,

Eric Berti,
Consul général de France à Hong-Kong et Macao

• • •

Mon ami René Aicardi s’est éteint loin de l’Asie sur cette terre provençale du Haut Vaucluse qui nous était à tous les deux si chère et qu’il aimait évoquer à chacune de nos rencontres. Je souhaite adresser à la famille de René et à ses amis mes plus sincères condoléances.

Comment ne pas rendre hommage à cet homme au caractère si sympathique apprécié de tous, René avait fait le choix avisé de dédier aux autres son expatriation et a tant fait pour la communauté française. Pendant plus de 30 ans au-delà de tout clivage politique, il a défendu les intérêts et apporté un soutien sans faille aux Français expatriés.
Élu au CSFE (Conseil supérieur des Français de l’étranger) en 1983, il a été par la suite conseiller à l’AFE (Assemblée des Français de l’étranger) pour la circonscription de Tokyo (Chine, Corée, Japon, Hong-Kong et Taïwan) et enfin conseiller consulaire pour Hong-Kong. A chaque étape de son parcours, il a toujours été un relais efficace pour nos compatriotes et une écoute salutaire pour les Français rencontrant des difficultés. Tous ceux qui ont eu la chance de l’approcher mesurent combien il nous manquera.

Thierry Mariani,
Ancien Ministre, Député de la 11ème circonscription des Français établis hors de France

• • •

Mon René,
Avec le temps tu es devenu « mon René », expression d’une amitié forgée sur un même engagement et le partage des mêmes passions. Plus besoin de parler beaucoup ; nous nous comprenions. Entier, tu ne transigeais pas sur les valeurs humanistes qui faisaient de toi un ami sincère, fidèle et d’une générosité sans bornes. Discret, il fallait deviner tes tribulations auprès de ceux qui se sont battus dans différents pays pour la liberté. Humble et d’une grande pudeur, tu t’occupais des autres avant de penser à toi. Ton dévouement au service de tes élèves puis de tes compatriotes dans le cadre de ton mandat électif a été sans failles et un modèle pour nous tous.
Rimbaud a colorié les mots, toi tu les parfumais. Tu as quitté la pièce mais ton rire, ton regard qui savait lire les âmes et ton accent du Sud qui embellissait tes paroles ne nous lâchent pas. Avec Pierre, et quelques autres, nous n’oublierons jamais le parfum de ta vie. Nous le sentons tous les jours pour oublier le vide créé par ton départ. La preuve ! Tu rassembles encore autour de ton nom. La mémoire ne vaut que si elle est partagée. Nous avons en commun d’avoir connu René.
Réjouissons-nous en et continuons longtemps à faire vivre ses combats.

Hélène Conway-Mouret,
Sénateur des Français établis hors de France

• • •

Avec René Aicardi, nous perdons un militant, un combattant, une personnalité si attachante et si particulière dont l’attachement aux principes et la ténacité était exemplaires.

Ses convictions, sa culture, ses combats sa manière de les mener auront marqué beaucoup d’entre nous. Son arme, c’était la plume. Pour exprimer et convaincre. Sa stratégie, c’était le groupe, l’action en commun, ce qui fédère les énergies et les savoirs.

Jusqu’au dernier souffle il aura été un militant refusant qu’aucune des flammes qu’il avait allumé ne s’éteigne. Se réjouissant lorsque son combat lui permettait de penser que la mort n’était plus une question de jours et qu’il reviendrait auprès de ses proches, reprenant des luttes qu’il n’avait jamais abandonnées.
Une pensée à toutes celles et ceux qui à Hong-Kong ont accompagné à distance René au cours de ces derniers mois, où sa discrétion sur sa situation et sa santé n’avait d’égale que le besoin d’échanger sur leurs combats, dès qu’il en avait la force. Supervielle, auquel il se référait souvent, exprime mieux que quiconque ce que nous ressentons.

Quand les chevaux du temps s’arrêtent à ma porte
J’hésite un peu toujours à les regarder boire
Puisque c’est de mon sang qu’ils étanchent leur soif.
Ils tournent vers ma face un œil reconnaissant.
Pendant que leurs longs traits m’emplissent de faiblesse.
Et me laissent si las, si seul et décevant.
Qu’une nuit passagère envahit mes paupières.
Et qu’il me faut soudain refaire en moi des forces
Pour qu’un jour où viendrait l’attelage assoiffé.
Je puisse encore vivre et les désaltérer.   Jules Supervielle

Merci René.

Jean-Yves LECONTE,
Sénateur des Français établis hors de France

• • •

Adieu l’ami ! René Aicardi est décédé aujourd’hui. C’est une grande perte pour la communauté française de Hong-Kong qu’il a si bien représentée durant des décennies au CSFE, puis à l’AFE et, depuis 2014, comme Conseiller Consulaire. C’est aussi une grande perte pour ses amis et anciens collègues, parce que René savait, mieux que quiconque, qu’au-delà des options politiques, le seul combat qui rassemble c’est celui de la défense de tous les Français de l’étranger. C’était son engagement profond et nous le partagions. Je suis terriblement peiné d’apprendre sa disparition à quelques heures de m’envoler pour Hong-Kong où je me réjouissais de le retrouver. J’adresse à toute sa famille et ses proches mes plus sincères condoléances et mes pensées les plus amicales et attristées. Nous aurons avec le Consul général, la communauté française et les élus consulaires un moment de recueillement à sa mémoire lorsque je serai sur place. C’est bien la moindre des choses que nous devons à René Aicardi. Adieu l’ami !

Christophe-André Frassa
Sénateur des Français établis hors de France

• • •

René Aicardi vient de quitter ce monde après un courageux combat contre la maladie. Socialiste engagé dans sa jeunesse, il était avant tout un vrai Républicain, très gaulliste dans son action, toujours à la recherche de l’intérêt commun.

Pendant plus de 30 ans, sacrifiant sa vie personnelle au service des autres, il a apporté son soutien aux Français expatriés en Asie du Nord Est.

D’abord comme conseiller à l’Assemblée des Français de l’Etranger pour la circonscription de Tokyo, puis comme conseiller consulaire à Hong-Kong. Il était très apprécié de la communauté Française. Mais c’était aussi un homme de lettres. Ancien professeur, il avait l’amour de la langue Française et la défendait en soutenant l’action des établissements scolaires Français. J’avais eu l’occasion de m’entretenir longuement avec lui il y a quelques semaines. Il m’avait dit être tombé amoureux de la Chine et qu’il souhaitait finir ses jours à Hong-Kong qui l’avait si bien accueilli.
Qu’il repose maintenant en paix !

J’adresse à sa famille et ses proches mes plus sincères condoléances.

Jacques Godfrain, ancien ministre,
Président de la fondation Charles de Gaulle

• • •

Cher René,

La disponibilité, la gentillesse et la bienveillance dont tu as toujours fait preuve envers tes amis mais aussi et surtout envers ceux qui t’entouraient et qui sollicitaient ton aide ont fait de toi une des personnes les plus estimées de Hong-Kong. Ton accent et ton sourire étaient à la hauteur de ta réputation, remplie de chaleur et de générosité.

Nous n’avons jamais retrouvé une personne de ta qualité, ici en France ou ailleurs. Tu es et tu resteras un exemple pour nous tous. Nous sommes tristes d’avoir perdu un ami, un vrai, un sincère et la communauté de Hong-Kong un soutien sans faille.

Adieu et chapeau bas Monsieur René,

Olivier, Soko et Victoria Pierson, amis de Hong-Kong et de Nancy

• • •

« Un homme bien. fou des mots, Fou de Char, fou de la « Romaine Vaison » comme il appelait sa ville natale. Fou de Hong-Kong bien sûr et il nous rappelait il y a quelques semaines son attachement au Port parfumé : « Ne s’écoule pas un seul jour de mon moment provençal où je ne pense à nos retrouvailles parfumées de notre Port, autour de quelques « Compagnons ».

Il n’eut de cesse, avec une grande modestie, de nous apprendre l’art de la solidarité, de l’entraide et de l’engagement citoyen. Il s’est battu jusqu’au bout. Il est avec nous, en nous dans cette « chevauchée humaine » vers un peu plus de bien, un peu plus de bonté, un tout petit peu de plus de fraternité.
Adessias, Mon René. »

Jean-Philippe Gry

• • •

Entre amoureux de la langue de Molière…

Le 10 juin 2012, à l’issue du concert de Gérard Lenorman à Hong-Kong, René Aicardi avait ému aux larmes l’artiste en lui dédiant un poème… Avec Jacques Weber présent le même soir, ce fut un dialogue ininterrompu entre amoureux des belles lettres…

• • •

« Je suis touché… Il est de plus en plus rare de rencontrer des « personnages » si romanesques… Séducteur et sans doute solitaire. » Jacques Weber le 15 avril 2016

« Vivre libres »

A l’issue des attentats de janvier 2015, René Aicardi avait participé à l’une des marches silencieuses organisée par des membres de la communauté française et délivré le message suivant sur l’antenne de TV5MONDE :

« Le message à faire passer c’est de garder à partir de moments aussi douloureux, cette unité dans le cadre de notre pays pour montrer au monde entier que l’on veut vivre, mais nous voulons vivre libres »

• • •

Des mots, des maux…

Personne ne sait manier les mots mieux que toi, mon Cher René. Les mots nous manquent, surtout pour les mettre sur nos propres maux, pour dire toute la tristesse qui est en nous, qui est en moi. Tu étais, le confident, le conseiller, le compagnon, bref l’ami. Tu savais rassurer, expliquer, consoler et surtout ramener un sourire sur chaque visage. Ce port parfumé auquel tu tenais tant et dont tu parlais si bien, pleure ton départ. Tous, nous soutiendrons de maintenir ta mémoire à travers ton nom inscrit au lycée français Victor Segalen et au Consulat général de France, tes maisons.
Au revoir l’ami.

Catya Martin

• • •

Un ami que nous connaissions depuis plus de 20 ans nous a quittés et la vie dans le port parfumé qu’il aimait tant ne sera plus la même. Nous aimions bien nous taquiner sur nos tendances politiques et c’était toujours un réel plaisir de se retrouver. Avec ses envolées lyriques, toujours empreintes de soleil et qui mettaient du baume au cœur, René était une figure de Hong-Kong. Chaleureux, ouvert, drôle, il était totalement dévoué aux autres et défendait ses compatriotes avec ténacité.

Au revoir René. Tu vas nous manquer.

Christian et Dominique Chasset
Directeur de Hong-Kong Institute of Languages