Paul Cox, un photographe engagé
Originaire d’Afrique, au Zimbabwe, où il fait sa scolarité, Paul Cox part ensuite en Grande Bretagne pour entrer dans l’armée. Plusieurs métiers suivront, dans des fermes ou dans la construction, il fera aussi le tour de la Méditerranée avec son bateau. La photo reste toujours présente dans sa vie, une passion qu’il tient de son père, photographe amateur. A Hong-Kong depuis maintenant plus de six ans, il peut enfin vivre de sa passion. Rencontre avec ce photographe engagé auprès d’organisations humanitaires.
Propos recueillis par Catya Martin
Quand avez-vous pris conscience que vous pouviez vivre de vos photos ?
Lorsque j’étais plombier, je faisais de la photo le week-end et vu le temps passé, j’ai demandé à mon patron de travailler à mi temps. J’étais donc mi temps plombier, mi temps photographe. Depuis maintenant plus de six ans, je suis photographe à plein temps.
Quelles sortes de photos faites-vous au quotidien ?
Je n’ai pas de démarche commerciale avec mes photos, je fais beaucoup de portraits. Quelques mariages mais j’ai plus tendance à le faire pour des amis que pour des inconnus. Autrement j’essaye de m’en éloigner, ça détruit un peu la notion que j’ai du photographe. Maintenant mes photos sont plus axées sur des ONG comme Tsolmon Ireedui Foundation (TIF) mais aussi pour des organisations qui se battent contre les trafics d’enfants, en Thaïlande et au Cambodge.
Quelle a été votre première impression en arrivant en Mongolie ?
J’y suis arrivé pour la première fois en hiver, j’ai pu me rendre compte de la difficulté de vie surtout durant cette période critique de l’année. Ce n’est pas forcément beau, c’est très pollué, embouteillé, dangereux. Beaucoup de personnes sont ivres dans la rue. C’est un peu comme dans le film « Mad Max ». Je sais, je ne vous donne pas une image idyllique mais c’est la vie des gens là-bas.
Combien de temps faut-il pour obtenir la confiance des personnes ?
Cela prend du temps, j’ai fait beaucoup d’erreurs au départ. J’ai même du changer mon appareil photo. Au départ je travaillais avec un appareil photo plus gros qui semblait plus les agresser que vouloir les photographier. Je voyais la peur dans leur regard et ils s’enfuyaient.
Aujourd’hui j’ai un tout petit appareil qui ressemble plus à un jouet.
Au début, ils ne comprenaient pas que je veuille les prendre en photo, me questionnaient et allaient même jusqu’à quelques actes de violence.
J’ai donc fini par cacher mon appareil, prendre une cigarette et beaucoup parler avec eux, puis tout se fait assez naturellement, la confiance s’installe et là je demande si je peux les prendre en photo. J’obtiens des photos très sincères. On devient ami, ça prend du temps mais ça le vaut. Dès que j’arrive là-bas, je vérifie que j’ai bien mon petit appareil et mes cigarettes et c’est parti !
Quelle est la ligne directrice de vos photos ?
Bonne question… le titre pour mes portraits est : « Red hero » et en traduction mongole, cela veut dire Oulan-Bator. En ce moment je finalise un livre avec environ 70 photos, ce sont les photos que j’aime depuis le début de cette aventure. Il devrait être disponible en mars prochain. J’ai également une exposition prévue pour la même période.
Avec la Mongolie ce livre est vraiment un défi pour moi, tout comme l’exposition qui aura lieu dans la galerie Oi Ling gallery sur Hollywood Road. Dans ce livre on retrouvera des images qui ne seront pas dans l’exposition et qui racontent véritablement une histoire, l’histoire. Lors de la prise de photos je ne pense pas à l’aspect commercial et donc à la façon dont elles vont être présentées. Je cherche juste la bonne photo qui redonne de l’émotion, mon émotion.
Si vous deviez ne garder qu’une image de votre travail, quelle serait cette image ?
Ce jeune garçon sur la photo avec l’image d’un loup derrière lui. La photo d’ailleurs s’appelle le garçon loup. J’ai rencontré ce jeune garçon par chance, ce n’était pas prévu. Nous devions rencontrer une famille, l’ONG nous donne une liste de familles qui acceptent d’être photographiées. Dans les rues d’Oulan-Bator j’ai vu ce jeune garçon me regarder, il a arrêté de jouer et m’a regardé. Il y a eu une connexion, il était dans une famille avec une mère ivre et un père qui avait une sorte d’épilepsie, c’était assez dur puis il est devenu comme un symbole à mes yeux. Il est devenu ce jeune garçon qui pointe le doigt vers nous.
Nous devenons responsables de ce que nous voyons. Et ce loup est devenu également une sorte de symbole. Une sorte de gardien pour ce jeune garçon. Ce moment a vraiment été intense pour moi. J’ai essayé plusieurs fois de le retrouver lors de mes retours en Mongolie mais je n’y suis pas encore arrivé. Personne ne sait où il est.