Economie

Natixis : essai gagnant transformé en Asie-Pacifique !

Née de deux socles français, Natexis et Ixis en 2007, la banque Natixis a su s’imposer aux côtés des plus grands. Présente dans 38 pays, couvrant la quasi totalité du globe (Amériques, Asie Pacifique, Europe, Moyen-Orient et Afrique), la banque internationale de financement, d’investissement, de gestion d’actifs, d’assurance et de services financiers du groupe BPCE, qui est aujourd’hui le deuxième acteur bancaire en France, forte de ses 17.000 collaborateurs à travers le monde, s’est taillée une place de choix en Asie. Basée à Hong-Kong, la direction Asie-Pacifique regroupe environ 650 collaborateurs dont près de 300 à Hong-Kong. Rencontre avec le directeur général de la zone Asie/Pacifique, Alain Gallois.

Propos recueillis par Catya Martin

 

Trait d’Union : Comment s’est passé le rapprochement entre Natixis et Ixis et pourquoi l’avoir lancé ?

Alain Gallois : La fusion a été au départ, en 2007, un peu chaotique. Il ne faut pas oublier qu’en 2008 le monde s’est écroulé pour les banques après l’affaire « Lehman Brothers ». C’est aussi un choc des cultures avec des positionnements plus « marchés » d’un côté et « financements » de l’autre.

Ce que nous voulions et nous avons réussi, était avant tout, bâtir une nouvelle banque sur des valeurs communes. C’est ce que nous appelions «New deal», avec en priorité la volonté de retrouver la confiance de nos clients, de nos actionnaires et de nos employés.

Notre stratégie était simple, nous concentrer sur ce que l’on sait faire de mieux en terme de produits et s’occuper de nos clients. Nous avons d’abord ciblé l’Europe et une fois la confiance, après la crise de 2008, de nos clients retrouvée, nous étions capables de lancer de grands projets de développements. Les marchés ont été accueillants et nos clients nous ont fait confiance.

Vous étiez une des rares banques à avoir anticipé la crise de 2011 ?

Oui nous avons anticipé en 2009 car nous devions prendre des mesures très drastiques et nous avons eu les résultats positifs en 2011 lors de la crise de l’euro avec un vrai scepticisme des marchés sur l’Europe provoqué par l’actualité notamment de la Grèce. Nous avions pris les bonnes décisions avant et avons donc moins souffert là où les autres avaient été moins attentifs.

 

Une fois votre banque mise sur les « rails » quelle a été la suite ?

Nous avons bâti un plan de développement, « New frontières », sur le modèle suivant : de la croissance, un développement mesuré et un contrôle de nos ressources.

Cela parce qu’on a été très marqué par l’importance de contrôler un certain nombres d’éléments qui font que les banques qui sont mortes en 2008 n’ont pas survécu car elles n’avaient soit pas assez de fonds propres, soit pas assez de liquidités. Surveiller ces critères prioritaires fait partie de notre ADN.

Nous sommes allés chercher la croissance non pas en Europe où nous avions déjà des positions de marché importantes et où le taux de croissance, potentiel de développement, est limité. C’est aux Etats-Unis d’abord puis en Asie que nous avons concentré nos forces.

 

Parlez-nous de l’action de Natixis sur votre zone Asie Pacifique ?

Il y a trois raisons pour développer la région. D’abord un potentiel colossal avec une croissance soutenue et durable.

On peut dire que la Chine ne représente plus 14 % de croissance annuelle mais 7 %, ce qui représente trois fois celle de l’Europe et deux fois celle des Etats-Unis…

Ensuite nous nous sommes concentrés sur nos forces, en particulier les métiers de financements structurés. Nous avons adapté nos métiers de marché afin d’apporter des solutions locales.

Le potentiel de la zone est assez impressionnant, l’Australie avec un marché de ressources naturelles tout comme l’Asie du Sud-Est où il y a aussi du trading de matières premières à partir de Singapour, Hong-Kong et de la Chine.

Notre travail a été de suivre nos clients chinois intéressés par l’Europe ou les Etats-Unis, leur proposer des cibles, les aider à financer leur croissance en dehors de l’Asie.

Ensuite, concernant les solutions de marchés, nous avons cherché quels étaient les pays de la zone où notre expertise était demandée. Nous en avons trouvé trois principaux, le Japon, la Corée et Taiwan.

Trois pays avec une épargne importante due au nombre élevé de personnes âgées et avec des taux d’intérêts bas. Cela voulait dire deux types de transaction possibles pour nous. D’abord un besoin de rendement et une recherche de solutions et d’idées notamment pour pouvoir rémunérer la masse d’épargne.

Ensuite, il fallait de la diversification, des choses nouvelles pour ouvrir vers d’autres solutions que leurs actifs domestiques. Nous savons « sourcer » des actifs européens et offrir de la diversification.

 

En interne, le fait que vous ayez restructuré avec des équipes plus locales a été un atout ?

Bien sûr. Nous avons sur la zone 20 % de Français et 80 % de « locaux ».

En revanche dans les directions comme Singapour et Hong-Kong qui sont cosmopolites, la proportion de Français est plus importante, et à Hong-Kong, nous avons plus de 30 nationalités.

Mais nous avons aussi besoin de personnes qui connaissent très bien le siège de notre banque et le fonctionnement d’une banque française. Ce sont les personnes qui, comme moi, ont un passé au sein du siège, connaissent tout le monde, nos forces et nos faiblesses, le mécanisme entre la Banque Centrale Européenne et Natixis. C’est très important. Chaque banque a sa culture, si on ne la comprend pas ça peut être très compliqué.

 

La Chine manifeste aujourd’hui de grandes ambitions pour sa devise et son marché. Quelle est la position de Natixis ?

La Chine est un pays complexe qu’il est compliqué de comprendre seul. On part de nos expertises pour leur apporter un service innovant et cela fonctionne sur des marchés comme « énergie et matières premières ». On s’intéresse aussi à une autre clientèle chinoise, celle qui va à l’extérieur, qui va chercher de la croissance. Soit en financement d’acquisitions, soit en leur trouvant des cibles.

 

Les FinTech sont de plus en plus présentes aujourd’hui. Quelle est votre position face à ce phénomène ? Vous sentez-vous fragilisé ?

Nous sommes une banque d’investissement. Nous opérons sur des métiers et nous sommes donc plus dans une relation de coopération que de compétition avec les FinTech.

On ne peut pas les ignorer, nous essayons de plus en plus de développer des partenariats. Nous coopérons pour optimiser nos procédés, ou robotiser ce que nous voulons faire. Ce sont donc avant tout des prestataires.

Certes elles se développent mais il leur manque surtout la base du métier : l’accès aux clients. Ils savent être plus agiles mais il leur manque des éléments. Aujourd’hui, la FinTech ne va pas remplacer les banques.

Il faut juste regarder jusqu’où le digital va impacter notre futur. Ce développement rompt un équilibre historique, à nous de le transformer en opportunités. C’est pourquoi nous travaillons avec un certain nombre de FinTech sur des niches où il est possible de coopérer.

 

Aujourd’hui, les régulateurs sont toujours de plus en plus exigeants sur leurs demandes. Comment les appréhendez-vous, de façon régionale ou locale ?

Les deux bien entendu. On se doit d’avoir un cadrage global sur nos régulateurs principaux (Banque centrale européenne notamment pour la France) et on se doit d’avoir des relations de proximité avec le régulateur de notre zone pour comprendre ce que l’on fait et s’adapter aux obligations et demandes qu’ils ont.

L’évolution de la règlementation est bénéfique pour les banques. C’est contraignant mais à la fin notre finance est plus solide avec des fonds propres plus établis, on a un secteur plus sain.

Cela nous permet aussi d’avoir des indicateurs de suivi très intéressant et performant, règlementé, en fin de compte, c’est une très bonne discipline.

Le régulateur aujourd’hui essaye de comprendre où en sont les banques et comment elles veulent se développer.

 

Ici HKMA me dit clairement : quels sont vos problèmes ? A quoi d’autre faites-vous face avec les autres régulateurs ? Comment peut-on vous aider ?

On se trouve plus dans une relation de partenaires.

A nous de faire en sorte que le plus en plus de régulation se transforme en mieux en mieux.

 

Natixis est-elle une banque « green » ?

Le développement durable est fondamental pour nous. Nous travaillons avec un code d’éthique, pas que la finance verte mais aussi la finance sociale, durable et c’est de cette manière que l’on gère nos employés, les relations employeur/employés mais aussi nos clients.

On ne finance pas le charbon et on s’oriente de plus en plus vers l’énergie renouvelable. Nous avons développé une compétence « verte » très puissante, « verte et sociale » vis à vis de nos clients. Il y a une équipe en interne pour nous aider à respecter ce code d’éthique qui est très lié à nos valeurs, nos principes et dans les pays dans lesquels nous sommes présents.

Chaque banque à ses valeurs. Ici on essaye de mettre en avant des ressources rares et le capital humain est une ressource rare, comme le capital tout court.

Un employé qui vient heureux est beaucoup plus productif.

 

Vous avez souhaité soutenir la première édition de « Lumière Hong-Kong », sur le modèle de la manifestation de Lyon, Pourquoi ?

Il y a une relation franco-hongkongaise pour cette première.

Que Natixis puisse être associé à un événement qui relie une région de France à Hong-Kong c’est assez fondamental. Dans ma politique de notoriété et de positionnement de notre marque, c’est très important.

Tout est réuni dans cette opération. Le lien entre la France et Hong-Kong, l’idée que ce soit un événement nouveau à l’image de Natixis, une banque innovante qui apporte des solutions adaptées à ses clients.

Mon message face à mes clients est clair, faire les choses différemment, proposer des solutions innovantes.

J’ai été séduit par l’idée que ce soit aussi le pont entre l’héritage, les lumières, l’histoire et la modernité. Là aussi ce sont des valeurs qui sont proches des nôtres, celles d’une banque installée, stable et moderne.

Tout ces éléments mis bout à bout sont l’image que nous voulons donner.

 

Et le Rugby ?

Le rugby c’est différent et cela épouse d’autres valeurs. On soutien le Racing depuis longtemps en France. Le directeur général du groupe, Laurent Mignon est même un ancien joueur de rugby. C’est donc assez naturellement que nous avons développé un partenariat, depuis plusieurs années, avec la section rugby du Hong-Kong football club. Les joueurs du Racing seront à nouveau présents à Hong-Kong pour un match d’exhibition face à une très bonne équipe sud-africaine, les Sharks, le 3 février, au stade d’Aberdeen.

C’est important de pouvoir capitaliser sur des choses qui restent. Natixis, à Hong-Kong c’est aussi la banque du rugby.