Lisboa, desassossega
Par Sven Larsonn
Rues, rues, rue, comme caparaçonnées,
Les collines de L’Animal Ville – je marche. Les masques hypocrytès, je les endosse, sous les pavés la ville et mes collines, sept et mon moi, mille.
J’aurais voulu les bateaux, pile, et je n’ai que mes pas trois. Tram, tramw, tramway. J’avance dans une ville à l’étroit. Les couleurs des maisons et les multicolores me ramènent à mon toit. Lisboa bue là.
Je deviens Pessoa, j’ai compris son chemin, qui n’est que son moi les miens.Je refuse d’entrer dans les églises, le baroque m’abhorre comme un cimetière sous la lune.
Traversas les traverses, des alexandrins, les rues rythment mon pas,
D’un fado fade inéluctable qui aspire à l’électricité des réverbères.
Oh s’envelopper là de la ville et de ses alexandrins, vivre à Lisbonne et de ses allées en tram, comme un joyeux malandrin, vivre de ses allées venues, vivre de ses alexandrins. La nuit le songe des jours. Qui suis-je ? Mon propre menteur. Narcisse du vice et de l’emprunt, je me hais tellement que je m’adore.
Je rencontre mille Pessoa qui s’ignorent,
Je me dilue dans une ville qui s’évapore.
Tram, traque, truc et les avenues plongent, ce sont les rues biseautées des Méditerranées entrevues, truculentes les linges poussières des gens vécus. Baixa danse entre les colonnes, barrio alto confond les somnambules éveillés et le point du jour ponctue nos vies nébuleuses. Qui-suis je Fernando sinon toi ?
La compassion est un verbe,
Pessoa son propre personnage, et dans son nom même, il est comme Ulysse qui n’est personne. Pessoa m’empoisonne puisqu’il me rend à moi. L’intranquillité, c’est Proust avec la certitude du gouffre. Je ne retrouve pas mon hôtel, moi est mensonge, Lisboa n’est plus Lisbonne, Lisboa est Limbes.
Nous appartenons à des lieux, à des conditions de descendance. Le refuser c’est exister. Lisbonne n’est personne, Belem est une ancre de sucre vers un moi qui se dilue dans les mers et les langues.
Noyé le moi, noyé a bon port.
Photo ©Sven Larsonn www.sauvesparlekong.com
