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Du côté de Guérande

Tout comme “temps ” et “vin” , le sel est riche en homonymes-homophones (à ne pas confondre avec les homonymes-homographes, vous en aurez un parfait exemple plus bas). « Qu’elle selle ? Celle sur laquelle se reflète le ciel ? C’est le bon choix, apposez votre scel avec zèle que je cèle la promesse de vente avec un peu de sel ! »

Par Stéphanie Delacroix

De quoi enlever le goût de la vie à tout étranger apprenant la langue de Raymond Devos – je rappelle à toutes fins et faims utiles que le monsieur était Franco-Belge et qu’il participa en 1968 au Talk-Show télévisé de Radio Canada intitulé le “Sel de la Semaine”.

Ce condiment, généralement propre dont le nom français vient pourtant du latin “sāl”, ce qui est assez ironique puisqu’en solution (faire bouillir 15 minutes 1 verre d’eau et ½ petite cuillère de sel) c’est une bonne solution (justement) pour désinfecter une plaie, et en gargarisme pour nettoyer les voies respiratoires en cas d’angine ou de sinusite. 

Je vous laisse choisir les attributs de votre Chlorure de Sodium de prédilection, à défaut d’y en avoir pour tous les goûts (quoique maintenant il se retrouve aromatisé à toutes les sauces, yuzu, algues, fumé, piment, thym, truffe etc.) il y en a de toutes les couleurs : Gris, rose, blanc, rouge, fin, gros, en fleur…

Depuis le Paléolithique on sait que c’est une substance essentielle, le véritable “or blanc”, pas la neige, ni la poudre à priser de perlimpinpins Colombiens, ça se saurait si les légionnaires Romains avaient reçu une partie de leur solde en neige ou cocaïne puisque c’est bel et bien le mot “sel” qui est à l’origine des mots “salaire”, “salarié”, “salariat”, je vous laisse substituer avec “neige” ou “coke”. 

Plus tard, c’est toujours le sel, et non pas la poudreuse ni la poudre qui servit par l’intermédiaire de la gabelle à financer la guerre de 100 ans, et l’addition fut effectivement assez salée, si vous me permettez de mettre là mon grain de sel même si je ne me targue pas d’appartenir pas au sel de la terre.

Aucune des expressions avec le mot sel ne manque de sel, même si mon opinion en la matière (NaCl) est évidemment à prendre avec une pincée de sel. Une cuisinière amoureuse (d’un jardinier aux cheveux poivre et sel par exemple) en met trop dans ses plats, et quelques microns déposés sur une plaie sont toujours de trop.

En anglais on fera bien attention à ne pas designer un des 34 amiraux de la Royal Navy comme étant un « old salt » (loup de mer)…cela serait assurément below his salt (dégradant socialement parlant), surtout si vous eat his salt (habiter chez quelqu’un) à chacun de vos passages en Angleterre.

Pissez dans un violon en Indonésien se dit membuang (jeter) garam (sel) ke laut (mer), jeter du sel dans la mer, et l’idéogramme japonais 塩 pour Shio est composé de celui de terre / minéral + couché bouche + assiette…le sel est effectivement un minéral que la mer dépose en fines couches sur le sol des marais salants et que l’on met dans sa bouche ou dans son assiette.

Amoureu.se.x ou pas mais ayant eu la main un peu lourde pour une soupe, sauce, plat en sauce, on peut neutraliser un peu du sel excédentaire en ajoutant quelques gouttes de citron ou de vinaigre et en refaisant chauffer avec une pomme de terre et ou une poignée de riz. 

Si ce déferlement d’informations (du nombre d’Amiraux en Angleterre à comment dessaler la soupe de courgettes de lundi soir) vous a fait tourner la tête jusqu’à l’évanouissement reniflez donc quelques sels de pamoison maison (pas sure qu’on en trouve en pharmacie, mais demandez toujours ça peut être drôle comme conversation) : un mélange de sels d’ammonium et de carbonate d’ammonium qui exposé à l’air se décompose en eau, en gaz carbonique et en gaz d’ammoniac extrêmement irritants pour les muqueuses. Ces sels furent utilisés du XVIe siècle au début du XXe siècle pour réveiller les femmes qui tombaient dans les pommes, se pâmaient à cause de leurs corsets trop serrés… et aussi pour ranimer les boxeurs.