Economie

Une nouvelle présidente pour la Chambre de commerce française de Hong-Kong

Présidente, élue depuis le 30 septembre, où elle a succédé à Pierre-Éric Saint-André, Gaëlle Olivier, CEO Asie-Pacifique de la Société Générale a, pour ses premiers mots de présidente, souhaité remercier la Chambre pour « son dynamisme et son esprit constructif au cours des derniers mois, malgré ces temps complexes ».

Remerciant son prédécesseur pour son leadership exceptionnel, reconnaissante envers les conseillers élus pour leur confiance et leur soutien, elle a déclaré qu’elle ferait de son mieux pour continuer à promouvoir un partenariat collaboratif entre les membres et avec l’écosystème de Hong-Kong ainsi qu’avec le réseau plus large de la Chambre française à l’étranger (CCIFI). Nous sommes allés à la rencontre de la nouvelle présidente pour en savoir plus. Entretien.

Propos recueillis par Catya Martin

 

Trait d’union : Vous avez eu un parcours atypique, pouvez-vous nous en parler ?

Gaëlle Olivier : J’ai fait une école d’ingénieur, puis une école d’économiste l’ENSAE. J’ai très vite été attirée par l’Asie que je ne connaissais pas et y ai effectué mon premier stage au Crédit Lyonnais.

J’ai continué au sein du Crédit Lyonnais quelques années, en salle des marchés avant de décider de changer d’environnement. Là je suis passée en gestion d’actifs chez AXA, société où je suis restée 20 ans dont dix ans en Asie, entre le Japon, Singapour et Hong-Kong.

J’ai donc pu découvrir l’ensemble de l’Asie de l’Inde jusqu’à l’Australie.

Fin 2017, alors que j’avais la charge d’une ligne de métier pour AXA, l’assurance dommages qui représente à peu près 45 % de la taille du groupe, j’ai pris la décision de quitter le monde du corporate pour basculer sur quelque chose de totalement différent, je suis devenue « business angel ».

 

C’est à dire ?

La première étape de soutien pour une startup est souvent l’entourage, amis et famille, la seconde étape est celle des « business angel » et ensuite arrivent les fonds d’investissement.

Je me suis donc positionnée en « business angel » pour des startups au début de leur lancement.

Il y a beaucoup de façons d’aider des entreprises en développement, j’ai choisi, à cette époque, de les aider au tout début de la création de l’entreprise, là où on a la démonstration que le concept peut marcher et qu’on y croit.

J’ai beaucoup aimé ce travail qui consistait à soutenir et aider des entreprises et des équipes à démarrer.

 

Quels étaient vos critères de sélection ?

Tout d’abord, il fallait que ça fasse sens pour moi avec une contribution positive à la société telle que je vois la société évoluer sur les prochaines années.

Ensuite, je recherchais un angle « data innovation », afin d’apporter quelque chose de nouveau. En plus de ces deux points, il faut être à l’aise avec l’équipe et le produit proposé. Je suis donc allée sur des sujets très variés, de l’assurance paramétriques à des batteries à hydrogène en passant par des sols connectés.

 

Pourquoi avoir réintégré une grande entreprise comme la Société Générale ?

Pour replonger dans le monde Corporate il fallait qu’il y ait quelque chose qui me motive particulièrement. J’ai fait ce choix parce que j’étais convaincue de trois choses.

La première c’est que les banques européennes ne jouaient pas encore complètement leur rôle dans la société et que progressivement je trouvais qu’il y avait un ancrage qui s’était un peu fragilisé alors que je considère que les banques sont le seul acteur économique qui peut à la fois financer et stabiliser l’économie. Et qu’en période de crise, ce ne seront pas les fonds d’investissement qui vont être là pour aider à gérer une période de crise économique voire sociale.

Le deuxième élément est que la Société Générale est une banque extraordinaire, très riche de compétences et d’expertises et qui peut maintenant accélérer son leadership après les dernières années qui ont été davantage centrées sur le renforcement de ses activités, la mise en conformité avec des réglementations plus exigeantes.

Enfin la troisième raison est que je pense que l’Asie est encore sous-representée, c’est vrai pour la plupart des grandes banques européennes et américaines alors que c’est un territoire en pleine croissance économique, en plein développement. Même si cela va s’atténuer post Covid, cette croissance reste plus importante qu’en Europe, aux États-Unis et que dans beaucoup d’autre régions du monde. Il y a donc là, une surface financière que l’on peut accompagner et aider à développer.

Ces trois raisons sont un défi qui me motive et j’ai donc décidé d’y mettre mon énergie et ma passion pour quelques années.

Je suis arrivée juste avant la crise sanitaire avec un plan de travail bien préparé pour les six premiers mois et au bout d’un mois tout a explosé avec l’arrivée du Covid.

A travers cette période, les trois raisons principales qui font que j’ai rejoint la Société Générale n’ont été que confortées. Je pense que le Covid a ré-ancré les banques dans les sociétés et a montré que, dans cette crise-là, qui n’était pas générée par les banques, les banques pouvaient jouer leur rôle, ce qu’elles ont fait.

 

Qu’est-ce qui vous guide dans votre parcours professionnel ?

J’ai occupé des postes très différents chez AXA, sans jamais vraiment réfléchir à un plan de carrière.

J’accepte un poste et m’y investis totalement car le défi m’intéresse et qu’il se situe dans un environnement qui attise ma curiosité.

C’est important pour moi car j’ai une vie familiale, je suis mariée avec quatre enfants, je suis très contente de passer du temps avec eux et donc le temps que je passe dans ma vie professionnelle, qui est intense dans une journée de 24h, doit valoir le coup.

C’est ce qui me guide dans mes choix professionnels et c’est pour cela que je n’ai pas un parcours linéaire mais un parcours fait de rencontres et d’opportunités.

 

Parlez-nous de votre engagement au sein de la Chambre

Vivre et travailler à l’étranger permet de se rendre compte du tissu national et de sa force ou de ses faiblesses.

Mon premier poste important à l’étranger était au Japon avec de vraies problématiques de lobbying et de réflexion sur notre place face aux instances gouvernementales japonaises. C’est à ce moment que j’ai réalisé à quel point les États-Unis étaient extrêmement structurés, organisés et matures sur les sujets de lobbying, là où en Europe et en France en particulier, nous étions plus jeunes.

Quand j’ai été basée ensuite à Singapour, j’ai commencé à m’investir au sein de la Chambre française. La Chambre y avait un rôle particulier, faciliter l’arrivée et l’installation d’entreprises. Tout comme Singapour, Hong-Kong a un vrai potentiel pour faire connaître l’Asie, ouvrir des portes, et donc faciliter l’implantation dans la région.

J’ai donc déjà joué un rôle au sein de la Chambre de commerce à Singapour où j’étais également Conseiller du commerce extérieur (CCE). C’est donc naturellement, dès mon arrivée à Hong-Kong, que j’ai intégré le Comité exécutif de la Chambre et les CCE. Très rapidement Rebecca Silli puis Pierre-Éric Saint André m’ont demandé d’y jouer un rôle. Je pense que c’est important et encore plus utile dans une période comme celle que nous vivons depuis deux ans.

 

©AFP

Quelle est votre feuille de route ?

L’avantage d’avoir été au Comité exécutif avant d’être présidente, c’est que j’ai vu comment la Chambre fonctionne. Je trouve que, ce que la Chambre a réalisé pour ces deux dernières années, a été exceptionnel, deux années compliquées avec la crise sanitaire.

La Chambre a réussi à tenir son budget et à rester très active, en organisant webinaires qui ont très bien fonctionné avec des thématiques pertinentes et de bons niveaux de représentations dans les différentes thématiques.

J’ai donc envie de continuer, de conserver une chambre active et dynamique et surtout aidante pour la communauté locale, pour nos entreprises et qui garde cette ambition de positionner Hong-Kong en Asie dans le rôle soit de la « Greater Bay Area » et plus largement dans l’Asie Pacifique. Le rôle de la Chambre est avant tout de contribuer à aider à cela dans un contexte économique et politique qui a évolué.

 

Comment allez-vous travailler avec les autorités locales d’une part et consulaires de l’autre ?

Les relations que la Chambre entretient avec ces institutions sont très bonnes. Nos relations sont constructives et pragmatiques.

Nous essayons d’avoir un discours et une relation ouverte avec le Consulat, avec Business France et les Conseillers du commerce extérieur. Nos échanges sont fluides et ça se passe très bien. Nous avons également de bonnes relations avec le gouvernement. Nous participons à des échanges réguliers ce qui n’est pas le cas de toutes les Chambres présentes à Hong-Kong.

Notre travail est de faciliter les enjeux qui nous paraissent importants pour la communauté d’affaires. Dernièrement, nous avons co-signé, avec le consul général, une lettre à l’attention de Carrie Lam, pour appuyer sur le passage de la France dans les pays à risque moyen du point de vue du Covid, ce qui permettrait de réduire la durée de la quarantaine, qui est aujourd’hui de 21 jours.

Nous essayons de façon discrète mais appuyée de porter nos sujets et de créer une relation constructive et pragmatique avec le gouvernement.

 

Comment voyez-vous la contribution de la Chambre, en dehors des problématiques liées à la situation sanitaire ?

Nous essayons de mettre à profit les fortes compétences de nos membres pour animer des thématiques qui nous semblent importantes dans le monde d’aujourd’hui et nous partageons volontiers nos réflexions avec le gouvernement.

Nous avons par exemple contribue à la réflexion sur la « finance verte ». Hong-Kong monte en puissance sur ces sujets. Nous traitons aussi des problèmes de « supply chain », du « retail » et son évolution dans un monde, avec la crise qui changé la donne notamment avec la Chine continentale. Nos entreprises doivent se repositionner et la France a des cartes à jouer.

Certaines thématiques, portées par la Chambre ces deux dernières années, sont toujours présentes. Nous allons continuer à porter les questions liées à la diversité, c’est important, et aussi la Data et l’Innovation, où nous avons un véritable rôle à jouer.

Ce que j’aime dans le fonctionnement de la Chambre, en plus de son dynamisme, c’est que l’on se repose sur des conseillers, élus, qui sont au nombre de 40 et qui viennent aider, sur des comités thématiques, et animent ce fonctionnement. Nous allons continuer à être ouverts sur les sujets qui peuvent émerger des conseillers et des membres de la Chambre. Mon souhait est de garder une chambre qui ne soit pas statique mais ouverte aux nouveaux besoins et aux nouvelle demandes exprimés par nos membres.

 

Parlez-nous de votre rôle de président

Il est important de préciser que le rôle du président de la Chambre est un rôle non exécutif. Sophie Leconte est la directrice exécutive et effectue un travail remarquable au quotidien avec son équipe.

Je vois mon rôle plutôt comme celui de Chairman, avec un comité exécutif représentant des membres et qui essaye d’aider la directrice et les équipes de la Chambre à identifier les bons sujets, à les faire avancer. Je vois plutôt mon rôle comme un facilitateur.

Sophie Leconte a remarquablement maintenu la Chambre dans un contexte difficile et avec une très bonne relation avec les différents membres et donc avec une capacité à connecter, à mettre en relation, à identifier des signaux faibles et à faire vivre l’ensemble. Elle nous fait remonter les informations et ensuite c’est ensemble que nous travaillons et avançons.

 

Avez-vous un message pour la communauté d’affaires française ?

J’aimerais que cette communauté voit la Chambre comme un partenaire.

Nous n’avons pas forcément des solutions à tout, pas forcément toujours les moyens, mais nous pourrons encore mieux avancer si l’information est fluide, si nous échangeons et si nos membres nous interpellent sur des problématiques qu’ils peuvent vivre.

C’est cette fluidité-là qui m’intéresse.

J’aimerais continuer à faire vivre et à dynamiser la Chambre car je sais que la France a beaucoup à offrir. Même si nous ne sommes pas forcément historiquement les plus matures en termes de lobbying, si l’on compare aux américains ou même aux allemands, nous avons énormément d’atouts. Notre travail, au sein de la Chambre, est de faciliter la mise en relation d’une PME avec un grand groupe ou de regrouper plusieurs PME pour leur donner les moyens d’arriver à une solution co-contruite intégrant plusieurs acteurs de la Chambre, cela ne peut que nous rendre plus forts.

 

Que peut-on vous souhaiter ?

Que l’on garde ce dynamisme, que nos membres aient envie de participer et contribuer, ce serait formidable. Nous avons besoin de ces mains qui se lèvent pour s’engager. Nous avons 17 comités tenus par des membres, c’est formidable. J’aimerais bien que cette énergie positive continue à s’auto entretenir et à se développer.