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Sauvignon blanc, question de maturité

Mûr, moins mûr, pas mûr. Le grand cépage blanc a fait le tour du monde. Le sauvignon reste le plus mystérieux des grands cépages blancs, qu’on qualifie d’internationaux. Inexact pour le sauvignon dont le nom, à rapprocher de savagnin, savagnou ou de sauvage, le définit comme autochtone ou indigène.

Par Michel Bettane

 

C’est d’ailleurs là que le mystère commence, car notre pays lui a trouvé différentes origines. Le Sud-Ouest, une théorie renforcée par la présence du cabernet-sauvignon (croisement incontesté du cabernet franc et du sauvignon), et la Loire. Son origine génétique incomplète – on est à peu près sûr que d’un de ses géniteurs, le traminer – renforce le mystère.

Sauf qu’on est aussi à peu près sûr de sa consanguinité avec le chenin. La probabilité pencherait donc plus du côté d’une origine ligérienne. Autre mystère, la nature même du raisin sauvignon, ses précurseurs aromatiques, les thiols, liés à son acide aminé, la cystéine, qui n’a rien à voir avec le traminer et le chenin. Ces précurseurs, qui rappellent le buis, le genêt, parfois les agrumes et, s’il n’est pas mûr, l’asperge ou le pipi de chat, ont justement fait de ce cépage une vedette internationale, le huitième le plus planté dans le monde.

La France fait pâle figure avec ses 15.000 hectares (dont 6.000 en Gironde et dans la Loire) par rapport aux 20.500 hectares de Nouvelle-Zélande qui, grâce à son climat et à quelques artifices de vinification, a défini un type aromatique, imbuvable pour un traditionaliste, mais adoré du public mondial. L’œnologie bordelaise, dans sa recherche d’une modernisation du goût de son vin blanc sec a découvert les précurseurs précités et mis au point des techniques de vinification pour en exacerber la saveur.

Pour ma part, je reste fidèle à la définition du sauvignon comme grand cépage, un cépage susceptible de se mettre au service de l’expression des terroirs et des millésimes. Si je commence à reconnaître le cépage avant de reconstituer mentalement la matrice des sols, l’équilibre soleil-pluie de l’année, le choix de la meilleure maturité possible du raisin pour leur expression, tout comme des meilleurs principes de pressurage, de vinification et d’élevage pour y parvenir, je désespère de trouver le moindre accord gastronomique.

Voilà pourquoi les expressions ligériennes réussies me semblent infiniment supérieures à celles du Bordelais, avec les exceptions d’usage. Les sommets les plus éloquents viennent du Sancerrois, sur les sols calcaires du cœur de Sancerre et les silex de nombreux coteaux idéalement exposés des communes voisines. Les notes de fleur blanche, la transparence cristalline de la saveur, la longueur que prend le vin après un vieillissement de six à dix ans, la salinité supérieure de la fin de bouche, se retrouvent aussi en plus épicée dans quelques terroirs de Pouilly-sur-Loire, de Menetou-Salon, de Valençay, de Reuilly et Quincy, jusqu’aux confins du Chablisien.

Pour le reste du monde, lors de visites, j’ai repéré des terroirs de qualité au Chili, en Afrique du Sud, dans le Trentin et le Frioul italien, dans certains secteurs du Palatinat allemand, qui n’attendent que des progrès de civilisation et de conscience gastronomique pour que les vins les expriment avec plus de précision et d’éloquence.

 

Notes de dégustation

Par Christina Carranco

 

Corofin, Settlement Vineyard East Slope Pinot Noir, 2016 (Marlborough – Nouvelle Zealand)

Domaine “boutique”  familiale spécialisée dans la production des micros cuvées, dans les meilleurs terroirs d’Omaka Valley dans le  Marlborough. Ce vin se pare d’une robe rubis intense avec un bouquet qui s’ouvre aux senteurs d’airelles, roses fanées, de fines épices en fin de bouche.

 

Redford Dale, Elgin,  Freedom, 2018 ( Stellenbosch- Afrique du Sud)

Issu d’un des terroirs plus froids d’Afrique du Sud l’Elgin, cette cuvée est bâtie sur la finesse. Au nez des arômes nobles de petits fruits rouges et de violettes, tout ceci accompagne des  légères nuances sous-bois. La bouche est ample accompagnée des tanins soyeux. Finale minérale.

 

Perrot-Minot Morey Saint Denis, Rue de Vergy, 2017 (Bourgogne)

Un 1er cru  mythique dont les parcelles bordent celles du Clos du Tart. Un nez complexe et élégant qui s’exprime sur les framboises et  fruits de bois, bouche concentrée mais soyeuse, tanins effilées et harmonieux. Il a besoin d’au moins 2h d’ouverture avant dégustation. Longueur remarquable.

 

Lucy Margaux, Adelaide Hills, Noir de Fleurette, 2019  (Australia)

Vin naturel et biodynamique  qui appelle le printemps. Ce pinot noir atypique surprend par sa belle couleur rose pale, le bouquet  dévoile des  notes gourmandes de fleur d’oranger, fraises et même une pointe d’agrumes. Le milieu de bouche est croquant et la finale suave et acidulée. A boire jeune et légèrement frais.

 

Champagne Waris et Filles, Blanc de Noirs N/V

Domaine familial de seulement 7 hectares, propose un champagne 100 % pinot noir dont la robe éclate en brillance. Les bulles sont fines et persistantes. Au nez les arômes de coing, brioche et noisette sont séduisants et on les retrouve aussi en bouche. La finale est tonique et persistante.