« Sauvés pour le Bac » présent sur trois continents
Après avoir été sauvé par le Kong puis par la poésie, Matthieu Motte a décidé en 2015, il y a 9 ans, de sauver les jeunes étudiants pour le Bac. « Sauvés pour le Bac » était né. Nous avons voulu en savoir plus sur ses activités de tuteur auprès de nos jeunes lycéens.
Par Catya Martin
Trait d’union : Pourquoi vouloir sauver ces jeunes étudiants pour le Bac ?
Matthieu Motte : Pour vivre de ma passion (sourire). Arrivé à Hong Kong en 2015, cette ville m’a fait revenir à ma passion, la littérature. J’ai donc commencé à donner des cours de soutien scolaire et à me replonger dans les commentaires composés, les dissertations, les mouvements littéraires, et là, tous les souvenirs de mes années Khâgne sont revenus.
Aujourd’hui je sais que je serai professeur de Français et de Philo jusqu’à mon dernier souffle et c’est grâce à Hong Kong. Il a fallu partir bien loin pour se retrouver soi ! J’ai donc commencé avec 2/3 élèves, leurs parents me demandaient de « les sauver » même si c’est un bien grand mot…J’avais déjà lancé le magazine « Sauvés par le Kong » à cette époque, petit fanzine littéraire devenu aujourd’hui une plateforme culturelle.
C’est donc naturellement que je suis resté sur ce thème du sauvetage en déclinant « Sauvés pour la poésie » pour ensuite arriver à «Sauvés par le Bac ».
Ces premiers lycéens ont obtenu de bons résultats et le bouche à oreille a opéré, aujourd’hui je travaille avec une soixantaine de lycéens, répartis sur trois continents !
Vous couvrez trois continents ?
Oui avec des élèves à Hong Kong, Singapour, Shanghai, Tokyo et Bangkok, quelques-uns à Doha, et en Europe, entre Paris, Stockholm, Bruxelles, Barcelone. Je jongle avec les fuseaux horaires, c’est devenu un boulot en soi !
Vous étudiez l’intégralité du programme de français et philo à distance ?
Oui et j’ai un retour extrêmement positif.
Grâce à la visio-conférence pendant la Covid, le « online » s’est démocratisé. Il suffit d’un bon Wi-Fi pour que le cours se déroule sans anicroches.
On commence à l’heure, chacun est dans sa chambre et moi à mon bureau. Le cours dure une heure et demie et j’insiste sur la prise de notes: qu’il consigne ce que je leur apprends de nouveau. D’un cours à l’autre je vérifie que c’est intégré, que c’est acquis.
En parlant de notes, racontez-nous l’histoire du carnet magique ?
Ah, le carnet magique ! En fait, j’en avais moi-même un quand j’étais en première L en 1999, de l’autre côté du siècle. Il s’est rempli, s’est garni au fil des lectures de mots, de mots rares, d’expressions littéraires, de formulations, de mouvements, etc.
Aujourd’hui, mon carnet magique, qui existe depuis plus de 20 ans, est digitalisé, il est sur un document « Word » qui doit représenter 8.000 pages…
Bien sûr, je ne demande pas à mes élèves d’avoir 8.000 pages.
Et quand je leur demande de noter une définition ou un procédé littéraire, une figure de style, je n’attends pas une définition tout droit sortie de Wikipédia. Je leur demande de noter une ou deux phrases qu’ils vont retenir leur permettant d’acquérir une vraie autonomie. C’est le but du soutien scolaire, faire en sorte qu’ils soient en autonomie devant leur copie et qu’ils puissent restituer ce qu’ils ont appris.
Vous êtes un peu un coach avec du conseil et du soutien
Oui, exactement. L’idée est d’apparaître comme un référent, quelqu’un en qui ils peuvent avoir confiance, avec un suivi pédagogique personnalisé pour chaque élève. Ils peuvent faire appel à moi dès qu’ils ont une difficulté, dès qu’ils veulent me rendre un travail écrit. L’heure de cours est vraiment axée sur l’interaction avec une dynamique à l’oral mais je consacre beaucoup d’heures à relire ce qu’ils ont rédigé pour leur faire des retours précis et personnels.
La notion de coaching est réelle, je les motive, j’essaie de les stimuler en leur donnant des clés de compréhension d’un texte. Au-delà de tout ce qu’ils apprennent, avec le carnet magique, les définitions, la méthodologie, les mouvements littéraires, les verbes d’analyse littéraire, ils engrangent un véritable bagage culturel. Pouvoir structurer ses idées va leur servir certes pour le Bac mais aussi toute leur vie.
Comment faites-vous pour vérifier les acquis ?
Tout simplement, cours après cours, je les challenge sur le cours précédent, en quelques phrases, pour voir s’ils ont compris. Ce qui m’intéresse, c’est qu’ils développent des phrases structurées, sujet, verbe, compléments, avec de beaux verbes d’analyse littéraire qui vont leur permettre de briller à l’oral, ou briller quand l’examinateur ouvrira leur copie.
Comment faites-vous pour humaniser ces grands auteurs face à des jeunes lycéens ?
Beaucoup connaissent mon petit côté théâtral ! J’essaye de leur transmettre cette passion qui est la mienne. Ça c’est quand même un privilège aujourd’hui d’exercer un métier qui est une véritable passion. Et je crois savoir comment les y amener. Je vois dans leur œil, dans leur façon de parler, avec l’expérience, comment je vais commencer, comment je vais pouvoir les intéresser. Donc par exemple si on aborde Gargantua, au début je ne vais pas rentrer tout de suite dans l’œuvre, mais justement je vais leur parler de l’humanisme, de la renaissance, Montaigne, Rabelais, qui étaient ces gens, qu’est-ce qu’ils ont voulu faire, quel était le message qu’ils voulaient transmettre. Et puis on prend des voies de traverse, je fais un petit cours sur l’histoire, je parle de Gu- tenberg, je parle des explorateurs. Là, ils reviennent avec moi, je sens qu’ils commencent à maitriser l’auteur et puis le mouvement humaniste alors que je n’ai pas encore évoqué Gargantua. En fait, je leur donne les clés de compréhension de l’œuvre, une fois les clés acquises alors on rentre dans les textes. Et au final, au bout de quelques cours, ils ont une vision globale du mouvement littéraire, de l’auteur, de l’œuvre et ils comprennent mieux les textes qui deviennent accessibles.
Quelle est votre méthodologie avec ces jeunes ?
J’ai quatre piliers. C’est-à-dire que quand je me présente à eux, j’essaie de ne pas avoir l’air trop sévère, mais je leur dis clairement que je suis exigeant, qu’on va travailler, que je vais leur demander de ne pas seulement assister et être passif en cours.
Donc je leur envoie des documents, et dès le début, je leur envoie les mouvements littéraires, les figures de style et les verbes d’analyse littéraire et, bien sûr, je leur demande d’acquérir un carnet vierge qu’ils vont rendre magique !
Puis nous voyons la méthodologie ensemble. Révision des figures de style, des verbes d’analyse littéraire pour que le jour J et avant le jour du bac blanc ils soient prêts. Mon objectif est qu’ils engrangent les premiers bons résultats pour retrouver la confiance.
Un élève qui était en dessous de la moyenne et qui arrive à 14, 15, il a envie d’aller jusqu’à 18, 19, parce qu’il sait que c’est possible.
Quelle est la durée de vos sessions ?
Une heure et demie à deux heures parfois pour les élèves de terminales pour la Philo.
J’ai la chance d’avoir des élèves qui sont très bien entourés au quotidien. Ils viennent à mes cours en sachant qu’on va travailler. Donc ils sont demandeurs et très motivés. Tous sont dans des lycées français qui sont excellents, avec des professeurs qui sont excellents, des parents qui les accompagnent, et d’ailleurs, souvent je leur dis, je leur répète, « vous êtes nés avec une bibliothèque autour de vous, je suis sûr que dans le couloir il y a une étagère où se côtoient Camus, Hugo, Rimbaud et consorts, vous n’avez qu’à leur dire bonjour ».
Si je regarde juste la promo que je viens d’avoir, elle était excellente. Ils étaient investis, ils motivés, bienveillants, s’entraidant. Ils ne laissent jamais un camarade sur le bord de la route. Il y a une émulation qui se crée. Et en fait, l’heure et demie de cours est un bon moment où on échange, ils apprennent et puis tout à coup, ils commencent à compren- dre que ça fonctionne. Donc au final, vraiment, au bout de quelques semaines, au bout de quelques mois, avec du boulot, avec un peu d’abnégation, ça paye.
Vous démarrez à partir de la 3e jusqu’à la terminale
Oui, c’est ça. Je les épaule depuis la 3e pour le brevet des collèges. La majeure partie de mes élèves se trouve en Première pour le baccalauréat de français et souvent je les récupère ensuite en terminale pour la philo.
Donc aujourd’hui si je fais une moyenne des notes qu’ils ont, nous sommes à Hong Kong, autour de 16,5/16,75. Et pour l’Europe, la moyenne est à 17,5 écrit et oral confondus. Ce qui est important c’est avant tout de bien préciser que leurs bonnes notes, comme leurs mauvaises notes, leur appartiennent. Souvent ils me congratulent mais ces notes là ce sont les leurs.
De mon côté, voir ces bons résultats me conforte dans la méthode employée. Je suis confiant dans la manière que j’ai de mener mes cours, de la façon avec laquelle je les épaule. Quel que soit le niveau de l’élève et son rapport au français, quel que soit le programme, je pense être à même de les mener à de très bons résultats. Je suis très fier d’eux.
Sauvés pour le bac, c’est combien de personnes ?
Je suis tout seul. C’est aussi un gage de confiance que peuvent avoir les parents, car je suis le seul interlocuteur.
Ça reste une grande responsabilité pour une seule personne.
Oui, c’est vrai, mais j’aurais du mal à les confier à quelqu’un d’autre (sourire).
Je n’ai pas l’ambition d’avoir des milliers d’élèves.
En début d’année je commence avec une vingtaine, des petits groupes. Puis plus on avance vers l’échéance de l’examen, plus j’ai du monde pour les stages et ensuite en cours. J’arrive donc à la fin avec une soixantaine d’élèves.
Ces 60 élèves, je les connais, je les connais même très bien. Je connais les parents qui par ailleurs parfois viennent aux événements culturels que j’organise comme « Alchimie du Verbe » ou les quiz, où on peut parler de la progression de leurs enfants ou des petites lacunes qu’il faut encore corriger et ainsi partager cette responsabilité.
Couvrir l’ensemble des continents avec les créneaux horaires différents, quand dormez-vous?
Alors justement, je n’ai pas tous les continents, c’est impossible. J’ai refusé des demandes à New-York et en Australie car justement il fallait un peu de temps pour dormir (rires).
Quand je suis en Europe, je travaille avec les élèves qui sont en Asie le matin et ceux basés en Europe l’après-midi et quand je suis à Hong Kong, il arrive parfois que le mardi ou le jeudi je démarre des sessions vers 23h ou minuit pour mes élèves en Europe mais ce n’est pas l’idéal… Travailler avec des élèves de plusieurs continents est stimulant. Les programmes ne sont pas forcément les mêmes et les profils sont différents.
Ce qui reste important est cette relation de confiance que nous avons réussi à instaurer même en ligne.
On parle des élèves effectivement qui sont dans un cursus français. Je crois savoir qu’il y a quelques élèves aussi en IB ou en DELF ?
Oui, il y en a quelques-uns chaque année. Là aussi c’est stimulant pour moi car ce n’est pas du tout le même programme et pour mes élèves en DELF, c’est encore différent. J’ai face à moi des élèves qui sont anglo-saxons, qui sont hongkongais. Donc c’est une autre approche.
On a parlé des ateliers hebdomadaires mais que faites-vous durant les stages ?
Les stages sont proposés durant les vacances scolaires. On fait un travail de dissertation, de commentaire composé. Beaucoup de rédaction de commentaires aussi et avec corrections en direct, durant la séance. Je les accompagne de l’introduction a la conclusion en peaufinant les axes et les paragraphes avec eux.
Comment ça se passe concrètement quand on veut inscrire son enfant ?
Les parents peuvent inscrire leur enfant facilement en m’envoyant une demande par Whatsapp ou via les réseaux sociaux (Facebook, Instagram). Ce sont des sessions d’un trimestre, vous payez soit par session soit au mois.
Pouvez-vous nous parler de vos activités en dehors de « Sauvés pour le Bac » ? Notamment l’atelier chant et éloquence au lycée français l’année dernière.
Il s’agissait d’ateliers de deux heures, qui s’articulaient autour du chant et de l’éloquence. J’avais des élèves de Seconde à qui j’apprenais à placer la voix, la faire résonner et puis j’enchainais avec un petit cours sur l’argumentation, l’éloquence, la rhétorique, comment structurer ses idées.
J’allais aussi plus loin avec la gestuelle du corps. Comment dans son positionnement, dans sa stature, dans son comportement et justement dans l’utilisation de sa voix le message passe. Nous avons aussi travaillé sur la gestion des silences et des murmures pour capter l’attention de l’auditoire.
C’était une superbe expérience.
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