Culture

« Same & Different » : l’amour XXL d’Antoinette Rozan en vedette de la HK Affordable Art Fair 2018

Dévoilée en avant première au public le 3 mai, l’œuvre monumentale d’Antoinette Rozan accueillera du 17 au 20 mai prochains les visiteurs à l’entrée de la Hong-Kong Affordable Art Fair au Convention and Exhibition Centre. L’artiste française a en effet accepté l’invitation des organisateurs pour réaliser l’une des quatre œuvres iconiques de l’édition 2018. A l’origine, « Free » messager d’amour et sculpture fétiche de la sculptrice. Elle sera ainsi déclinée d’une part en dix-huit statues miniatures multicolores pour composer l’œuvre « The life Time » et d’autre part en deux sculptures – l’une rouge et l’autre noire – géantes, « Free XXL » « pareilles mais différentes ». De la création de l’original XXL en argile à la finition en fibre de verre, plus de trois semaines d’un travail de titan ont été nécessaires à la réalisation des deux géants. Des étapes ou les coulisses de l’exploit, partagées par Antoinette Rozan en exclusivité avec Trait d’Union…

Par Philippe Dova

 

Même si entre elle et Hong-Kong l’histoire d’amour dure depuis plus de vingt ans, c’est au sud de Canton qu’Antoinette Rozan a choisi son atelier pour réaliser sa sculpture géante. Un lieu inattendu où règne la sérénité, au sein d’un milieu naturel préservé, à quelques centaines de mètres du brouhaha de la ville où le chant des oiseaux remplace celui des avertisseurs sonores. Sous le hangar, à l’abri du regard des curieux, Free se distingue par sa taille et son allure unique des reproductions de statues académiques chinoises qui l’entourent. « La difficulté lorsque l’on fait quelques chose de grand, c’est d’augmenter les volumes ! Une petite bosse se transforme en une grande. Parfois on est un peu timide mais il ne faut pas ! », souligne l’artiste en modelant l’argile de la coiffe version XXL de « Free » pour la reproduire à l’identique de celle du bronze original mais en quatre fois plus grand. Peu à peu la sculpture prend formes et reliefs, le geste est précis, la concentration extrême, l’effort physique particulièrement intense. « C’est un métier assez méditant ! On est seul avec sa terre, c’est une vraie communion. Le jour où l’on arrive à apprivoiser ses peurs de ne pas arriver à réaliser la pièce et son égo cela devient une véritable histoire d’amour avec la terre parce que l’on sait que la terre ne trahira pas. C’est une matière terrestre naturelle, très sensuelle qui vit avec notre travail de la main et de l’outil qui l’accompagne ; elle répond à ce que l’on fait. Avec la terre il est possible de recommencer, si cela ne nous plaît pas la terre nous attend. C’est la grande différence avec le plâtre. Avec le plâtre il faut aller très vite, c’est soudain, dans un élan. J’aime beaucoup travailler les deux matières, j’avais d’ailleurs réalisé une statue XXL en plâtre pour mon exposition à Marseille en 2013, c’est une matière assez brute au départ et à l’arrivée d’une grande douceur ».

 

Pour arriver à reproduire la douceur et l’effet lisse du plâtre, Antoinette va avoir recours à des bandes de tissu et les appliquer sur les différentes parties de la statue. « C’est l’âme de cette sculpture, l’utilisation des bandes de tissu pour la réaliser lui donne sa personnalité. Je n’arrivais pas à imaginer que j’y arriverais avec de la terre et là je retrouve l’ambiance du plâtre : c’est rapide et efficace ! En fait cela me ressemble, je suis une artiste qui est dans l’élan, pour moi les choses doivent se faire dans l’élan. Certains artistes vont être dans la patience, le travail le plus parfait, le plus impeccable, très proche de la méditation pour atteindre la perfection. Personnellement je suis ainsi dans  la vie ! C’est l’inverse, c’est une même méditation car il faut être très concentré mais il ne faut pas se poser de questions, il faut y aller, oser, faire confiance à son intuition, à son expérience. Mon expérience du travail du plâtre me sert, c’est formidable. Une fois que l’on ose, ce n’est que du bonheur ! ». Au fil des jours le « bonheur » s’est concrétisé par une statue d’argile de 2,70 mètres de haut, l’heure est à la signature de l’œuvre. « La signature c’est le moment où l’on se dit que c’est terminé ce qui est très difficile pour un artiste ! C’est en quelque sorte un abandon mais là je suis particulièrement heureuse… »

 

La réalisation de la statue en argile n’est qu’une étape, certes la plus longue, de celle de la sculpture finale. Telle une momie, Free XXL va être recouverte de silicone, entourée de bandelettes en fibre de verre et plâtre pour créer le moule de cette sculpture finale en résine. Un procédé proche de celui utilisé pour fabriquer les moules des œufs et lapins de Pâques ou l’équivalent d’un négatif pour une photographie.

 

Après quelques jours nécessaires au séchage de la « momie » l’heure est au « démoulage » : il s’agit de retirer en plusieurs morceaux le corset de la statue pour replacer à l’intérieur de la coque la silicone puis la badigeonner de résine en alternance avec des plaques de fibre de verre. Un moment particulièrement éprouvant pour l’artiste : débarrassée de son corset, la statue d’argile réapparaît mais pour être détruite au fur et à mesure des opérations. « C’est une sorte de déchirement, il m’a fallu plus de trois semaines pour réaliser avec mon assistant étudiant sculpteur de l’université des arts de Canton, la sculpture en terre. Même si nous savions au départ qu’elle serait détruite c’est toujours beaucoup d’émotion. Dans le même temps Free va renaître sous sa forme définitive, c’est magique et c’est ce qui console !

A ce stade nous sommes en plein dans l’art éphémère ! ».

 

Après quelques jours de séchage, les différents membres du corps de Free sont réassemblés. La sculpture a pris sa forme définitive, il est alors temps de sélectionner le rouge mat qui la recouvrira, dernière étape pour elle avant de dévoiler son message au public hongkongais. « Free est ma sculpture fétiche, elle m’a permis d’exprimer vraiment ma personnalité. L’idée est que même si en apparence l’homme et la femme sont différents, ils sont les mêmes, c’est une illusion… A contrario, nous nous ressemblons probablement tous mais nous sommes tous différents ; c’est également une illusion. Free est un messager d’amour, quel que soit sa taille. »

 

http://antoinetterozan.com/

 

  • Hong-Kong Affordable Art Fair :

Du 18 au 20 mai,

Hong-Kong Convention & Exhibition Centre

 

  • Exposition Solo Antoinette Rozan à Central –

Sculptures et peintures jusqu’au 30 mai :

ROUGE Ephémère Art Gallery.

1/F, flat B, 89 Hollywood Road, Central – Hong-Kong

Tel : (+852) 2323 2394