Quelques douceurs dans un monde de vérités alternatives
Par Stéphanie Delacroix
En Indonésie, on aime tellement les bonbons – permen : contraction de peppermint, nos cousins québécois nous on fait presque le même mot avec leurs paparmanes (bonbons, même si c’est un peu daté) – qu’il y’en a immanquablement un bol bien rempli (chaque bonbon dans son petit emballage plastique individuel, aaarggghhh) posé sur chaque guichet de banque, bureau de médecin, des impôts, de la poste, chez le coiffeur, le notaire, l’avocat. Je connais même des supermarchés où l’on vous rend la monnaie (les centimes seulement pas de panique) en bonbons ! Ils sont parfois à la menthe – et méritent ce faisant leur nom – mais souvent au tamarin, au gingembre ou au café. Les Balinais en mettent quasiment tous dans leurs multiples petites offrandes quotidiennes (canang) aux bons (bons) et mauvais esprits.
En Angleterre non plus l’habit ne fait pas le moine – ni le nom le bonbon à la menthe – car on peut très bien manger des After Eight avant 8 heures, ou ne plus en manger du tout…huile de palme oblige ; Idem pour les Quality Street à cause justement de la qualité du « chocolat » à l’huile de palme, et des emballages…
J’adore (probablement à cause du marteau) confectionner une confiserie traditionnelle de nos amis d’Outre-Manche les Honeycomb aka Cinder Toffee aka Hokey Pokey, qui ne contiennent pas forcément de miel (honey), jamais de peigne (comb), ni de nid d’abeille (honeycomb) ou même de cendre (cinder), et encore moins de sortilège de sorcière (quoique le bicarbonate…) … ça tombe bien parce que quelque chose me dit que ce serait moins bon.
- 100 grammes de sucre roux en poudre
- 4 cuillères à soupe de golden syrup (sirop de sucre) ou de miel
- 1,5 cuillères à café de bicarbonate de soude
Dans une GRANDE casserole on mélange hors du feu le sucre et le sirop, on chauffe jusqu’à épaississement et coloration marron clair (150°C). On éteint le feu et on ajoute en mélangeant au fouet le bicarbonate. Ca va mousser (beaucoup, comme par magie, Hokey Pokey, Hocus Pocus, Abracadabra, mais surtout par chimie), on transfert le tout sur une feuille en silicone, on étale et quand c’est dur (quelques heures après quand même) on casse tout à coups de marteau ou histoire d’avoir l’air moins folle à coups de rouleau à pâtisserie, pour obtenir des éclats de caramel alvéolés (Honeycomb). On peut ensuite les tremper dans du chocolat noir fondu, parce que c’est bon et parce que ça les empêche de coller.
Au Japon, les mochi et autres wagashi 和 (japon) 菓 (bonbons) 子(fils) offrent souvent de faux espoirs aux gourmands internationaux habitués au chocolat en fourrant les pâtes de riz d’anko (de confiture d’…haricots rouges… youpi !) qui a la même couleur que le chocolat mais pas du tout du tout le même goût.
C’est vrai qu’en France aussi, on a des bonbons qui peuvent paraître « bizarres » aux becs sucrés (dont je suis), ou dents douces (sweet tooth) d’autres pays… mais si voyons, même pour nos enfants je pense que c’est bizarre de manger des violettes, coquelicots, et autres sucs de pin cristallisés dans le sucre (fleur ou résine, blanc d’œuf, sucre et soleil).
Les Irish Potato (sans patates) de Philadelphie aux Etats-Unis (pas en Irlande) sont quant à eux des petits bonbons frais composés de noix de coco râpée, de beurre, de cream cheese (de Philadelphia, ah tout s’explique, nous on a le Saint-Moret ) et roulés dans de la cannelle en poudre… et donc sans Solanum Tuberosum (pommes de terre) dans les ingrédients, juste l’apparence trompeuse de mini patates pleines de terre, et le nom en forme de clin d’œil à une période marquante de l’histoire d’Irlande : la Irish Potato Famine de 1845 à 1852 marquant le début d’une période d’émigration massive, six millions d’Irlandais quittant leur pays dans les années qui suivirent principalement pour aller peupler les Etats-Unis.
A ne pas confondre évidemment avec les bonbons roulés aux pommes de terre (en purée avec beaucoup de sucre et une couche de beurre de cacahuète) crées dans les états du sud des Etats Unis pendant la grande dépression des années 30, ces trois ingrédients locaux y étant alors assez accessibles et nourrissants.
An apple a day keeps the doctor away nous dit-on … et avec les pommes d’amour (pommes crues enrobées de sucre caramélisé et colorées en rouge) ça fonctionne aussi ? Moi, je militerais bien (en me brossant bien les dents) pour un bonbon, un bonbec, un ‘bec, une chatterie, une douceur, une friandise, une gourmandise, une sucrerie, par jour !