Première mondiale pour CMA-CGM à Shanghai
La mise à l’eau du plus grand porte-conteneurs au monde propulsé au gaz naturel liquéfié le 25 septembre au chantier naval Shanghai Jiangnan-Changxing est un tournant dans l’engagement environnemental du transporteur maritime français.
Par Philippe Dova
Avec ses 400 mètres de long, ses 61mètres de large, ses 78 mètres de hauteur sa gigantesque hélice de 92 tonnes et 10 mètres de diamètre, le futur vaisseau amiral du groupe français ne passe pas inaperçu dans le chantier naval de Shanghai !
Construit par China State Shipbuilding Corporation, le porte-conteneurs est un concentré de technologies au service de la protection de l’environnement et une prouesse technologique grâce notamment au savoir-faire de l’industrie française et européenne.
Le choix d’un moteur alimenté en gaz naturel liquéfié à la place du fuel confirme, après l’annonce en août dernier de ne jamais emprunter la « route du nord » pour protéger l’environnement arctique malgré l’avantage concurrentiel que cette route pourrait représenter, l’engagement de CMA-CGM en faveur de l’environnement.
L’alimentation en gaz naturel liquéfié réduit de 99 % les émissions d’oxydes de soufre et de particules fines, jusqu’à 85 % les émissions d’oxyde d’azote et de 20 % les émissions de C02.
Après quelques mois consacrés aux derniers réglages et aux essais en mer, le CMA-CGM Jacques Saadé devrait quitter le chantier naval shanghaien pour mettre le cap sur Marseille à la fin du mois d’avril 2020. Il sera alors le premier d’une série de neuf bâtiments identiques à être immatriculé au Registre International Français (RIF) et rejoindra la flotte du Groupe sur la ligne Asie-Europe du Nord.
Rodolphe Saadé : « Pour nous la protection de la planète est un sujet majeur ».
Présent à Shanghai le 25 septembre dernier entourés des membres de sa famille, des collaborateurs du groupe, d’officiels chinois et français et de nombreux clients Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM a accordé un entretien exclusif à Arnault Miguet (France 2) et Philippe Dova (RTL et Trait d’union) à l’issue de la mise à l’eau du CMA-CGM Jacques Saadé.
Vous semblez ému ?
Rodolphe Saadé : Oui je suis ému à différents titres… Tout d’abord parce que ce navire porte le nom de mon père. C’est un hommage symbolique à celui qui, parti de rien, a fondé l’entreprise à Marseille en 1978 et en a fait l’un des leaders mondiaux du transport maritime et de la logistique. Ensuite c’est le premier navire de la flotte qui sera motorisé au gaz liquéfié et en plus c’est le plus grand de notre flotte avec une capacité de 23.000 containers.
Le gaz reste un pari, vous êtes pionnier en matière de protection de l’environnement dans votre secteur d’activité mais d’autres entreprises pourraient faire le choix du bio-fuel ou de l’hydrogène ?
Lorsqu’il s’agit d’environnement ce n’est pas un pari que l’on prend. Nous avons des urgences, des responsabilités vis-à-vis de la planète et j’ai estimé qu’il était légitime d’utiliser des navires au gaz et non plus des navires conventionnels. C’est pour cela que pour nous le CMA CGM Jacques Saadé ne pouvait être qu’au gaz.
Nous étudions par ailleurs toutes les technologies possibles mais aujourd’hui l’électricité ne fonctionne pas, l’hydrogène n’est pas disponible, la seule technologie disponible c’est celle qui utilise le gaz liquéfié, c’est la seule capable aujourd’hui d’éliminer complètement les émissions de souffre.
Vous vous êtes engagé récemment à ne pas emprunter la « route du Nord », est-ce dans la même démarche de développement durable ou est-ce un coup marketing ?
C’est la démarche d’une compagnie maritime responsable. J’ai entendu la remarque sur le coup marketing mais en ce qui concerne CMA CGM et notre stratégie d’avoir investi dans le gaz, je ne pense pas que ce soit du marketing. Nous sommes vraiment responsables de nos actes et pour nous la protection de la planète est un sujet majeur.
Comment allez-vous réussir à convaincre vos clients du surcoût que représente le transport de leurs marchandises sur ce bateau ?
Nos clients sont très favorables à notre stratégie à l’égard de l’environnement, ils saluent notre mouvement et sont prêts à nous accompagner. Au niveau des autres compagnies maritimes, nous souhaiterions vivement qu’elles nous suivent parce qu’aujourd’hui le gaz liquéfié est le moyen le plus à même de protéger l’environnement disponible sur le marché.
Pourquoi avez-vous choisi un chantier naval Chinois ?
Nous sommes présents en Chine depuis 1992. La relation que nous avons bâtie ici, initiée par mon père il y a de nombreuses années, a toujours été basée sur une relation simple, amicale et honnête. Aujourd’hui ce chantier naval est le plus à même de construire ce type de navires, dans les délais, en maîtrisant les coûts avec une qualité de construction exceptionnelle.