ChroniqueRegards

Lunes forteresses

Par Sven Larsonn (www.sauvesparlekong.com)

Il se souvient des deux lunes d’Essaouira qui comblaient de fêtes gibbeuses les fellahs ; le bleu des étoiles, le peintre les faisait couler en lave là.

Il reçoit le poème, tel le sachet de saveurs, que le thé du temps infuse avec lenteur; il y a des grains dans sa bouche de sable; les chameaux de bronze les éjacument en heurts.

Il revoit l’Agnus dei marchant royal sur le bouillon des tajines aux pruneaux coruscants; chaque pas-pelu est cadencé par les cordes; trois, du gumbri gnawa; toi ma Minouche qui me lis les revois.

Il ressent la Medina où l’olive et le thym là lavandent, où l’olive et le temps abondent, les frimas du hammam brûlant où les femmes voilées sont à moitié nues dans leurs cœurs rubiconds; il les chante en ronde.

Zinzinulent les muezzins, ses EarPods crachent du jazz. Et la chèvre du pays couvre la musique tout dévoilant la toile, le hamman s’évapore dans un long figement violet: les poissons volants du ports, les goélands aux étals et la fraternité menaçante de l’océan; il les dévore.

Il se souvient des deux lunes qu’essuyèrent ses yeux, Essaouira chancelante dans l’au revoir qui n’est pas l’adieu.

Photo : ©Sven Larsonn www.sauvesparlekong.com