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Le festival de théâtre de retour à Hong-Kong

La 5ème édition du festival, soutenue par près de 100 bénévoles, aura lieu du 24 au 27 février. Organisée au profit de l’association « Pour un sourire d’enfant » (PSE), les troupes de théâtre se produisent gratuitement et grâce aux différents donateurs, ce sont 71.000USD que l’édition 2019 a levée. Budget alloué au financement d’un nouveau jardin d’enfants à Phnom Penh. Comme chaque année, l’événement tant attendu par les amateurs de théâtre vous propose une sélection de pièces parmi les plus populaires en France avec des acteurs passionnés et passionnants. Nous avons pu échanger avec eux.

Propos recueillis par Catya Martin

 

1830 – « Sand, Hugo, Balzac », avec la compagnie Chouchenko. Rencontre avec Manon Montel, actrice et auteure de la pièce.

Trait d’union : Faire se confronter Sand, Hugo et Balzac est unique, pourquoi ce choix ?
Manon Montel : La vie est faite d’heureux hasards. Je venais d’adapter les Misérables de Victor Hugo pour la ville de Nemours en 2012, c’était les 150 ans de la parution de l’œuvre. En me penchant sur la ville et sur les écrivains qui y sont passés, j’ai vu que non seulement Hugo mais Balzac l’ont connue. J’ai proposé à l’adjointe à la culture une rencontre entre ces deux monstres de la littérature. Idée qui a tout de suite été acceptée. Une amie professeure de français m’a vivement recommandée de rajouter Sand… et voilà la formation de cet étonnant trio !

On entre dans leur vie, leur intimité, comment avez-vous gérer toutes ces émotions ?
Le plus important pour moi était de faire un travail le plus historique possible. La correspondance de ces auteurs est un outil précieux car elle révèle leur intimité. On les imagine comme des mythes de la littérature, ils le sont, mais ils n’en restent pas moins humain, d’où leur extrême sensibilité. C’est d’ailleurs cette sensibilité qui fait la beauté de leur écriture. Balzac et sa quête de reconnaissance. Sand et sa quête amoureuse. Hugo et sa quête de justice.

Dans vos « notes de mise en scène » vous parlez de « la place de l’auteur au sein de la société ». Avez-vous trouvé la réponse ?
Je ne pense pas qu’il y ait de réponse à trouver. C’est un constat. Sand, Hugo, Balzac sont humanistes mais/et aussi politique ! Chacun à leur façon s’est servi de la littérature comme outil pour faire avancer la société : Sand et son journal l’Eclaireur de l’Indre où grâce à ses articles elle essaye d’instruire le peuple. Hugo et ses Misérables où il dénonce les inégalités sociales, ses Châtiments où il dénonce la dictature de Napoléon le Petit etc. Balzac en inventant le courant du réalisme qui est à l’encontre du romantisme : il ne veut plus qu’on décrive la vie telle qu’on la rêve mais telle qu’elle est, c’est le père du naturalisme et de Zola.

Peut-on séparer l’homme de l’artiste ?
Question très difficile qui mérite une thèse ! mais si je peux apporter un début d’élément de réponse je dirai qu’on peut séparer le travail de l’artiste et l’homme mais pas l’homme de l’artiste.

Venir jouer à Hong-Kong représente quoi pour vous ?
Beaucoup de fierté et d’humilité ! Je suis très touchée que mon texte intéresse le public en France, nous avons déjà eu la chance de le jouer aussi en Italie et en Tunisie. A présent aller à Hong-Hong c’est repousser encore les frontières…

« Aime comme Marquise », avec la compagnie « Le jeu du hasard ».
Entretien avec Chloé Froget, actrice

Trait d’union : Vous présentez au public, Thérèse de Gorla puis du Parc, dite Marquise, inconnue jusque là. Pourquoi avoir choisi son histoire ?
Chloé Froget : Le parcours de Marquise est aussi extraordinaire que méconnu. Cette fille du peuple a fasciné les hommes les plus illustres de son temps par son talent, son charisme et surtout une bonne dose de culot. J’aime l’idée de raconter une page de notre Histoire à travers un nouvel angle, à travers le prisme d’une femme… et quelle femme !

Finalement, a-t-on la réponse à LA question concernant Corneille et Molière ? Corneille a-t-il vraiment écrit les pièces de Molières ?
LA fameuse question sur la paternité des oeuvres du talentueux et hyperactif Molière dont certains disent qu’elles auraient été écrites par le grand et indétrônable Corneille ! Cette grande question littéraire qui a fait couler beaucoup d’encre depuis 400 ans… Si vous souhaitez connaitre la réponse à votre question, je vous invite à venir voir le spectacle !
Venir jouer à Hong-Kong représente quoi pour vous ?
Il y a un côté “grande aventure artistique”. Je suis personnellement passionnée de voyages, et pouvoir lier le théâtre au voyage est une opportunité magnifique qui ne se présente pas tous les jours. Le Jeu du Hasard est une jeune compagnie de théâtre. Avoir cette proposition de jouer à l’international est une chance folle pour vivre une nouvelle expérience qui, j’en suis certaine, sera riche en rencontres, en partages et en émotions. C’est également très valorisant, car gage de la qualité du travail que nous proposons.

Cette pièce est aussi un témoignage fort pour les femmes, est-ce un combat important pour vous ?
Outre les reines et les maitresses, combien de femmes pouvons-nous aujourd’hui citer du XVIIème siècle ?.. Et maintenant… Combien d’hommes ? Le calcul est vite fait. Nous étudions l’Histoire des hommes de cette époque. Nous avons retenu le nom des hommes de cette époque. Nous mettons en valeur le talent, l’érudition, l’intelligence, le savoir, le pouvoir, l’influence, la grandeur de tous ces hommes. Cette transmission est importante. A condition qu’on n’oublie pas l’autre moitié de la population, qui, si vous lui prêtez autant d’attention, se revèle tout aussi admirable… voire plus ! Oui, un sujet qui résonne encore aujourd’hui.

L’Affaire Dussaert
Entretien avec Jacques Mougenot, acteur et auteur de la pièce.

Trait d’union : Pourquoi un monologue sur l’affaire Dussaert que peu de personnes ont encore en tête ?
Jacques Mougenot : Je suis comédien et auteur dramatique et suis par ailleurs passionné de peinture. Avec une première pièce sur l’art, « Corot », jouée à Paris de 1996 à 1998, j’avais pu traiter le thème de l’art classique et je cherchais le moyen de traiter celui de l’art contemporain et de son marché. En 2000 à Genève, j’ai assisté à une conférence de Mme d’Argenson sur le peintre Philippe Dussaert, dont elle fut la galeriste, j’ai été fasciné, par la conférencière d’abord, par le parcours atypique de ce plasticien ensuite, et ai vu dans une affaire peu connue concernant la vente d’une de ses œuvres le prétexte à aborder sur le mode de l’humour et du théâtre tant d’autres affaires plus médiatiques qui défrayent régulièrement la chronique de l’art contemporain.

Avez-vous la réponse à la question « jusqu’où l’art peut-il aller trop loin ? »
Bien malin (ou prétentieux) qui peut répondre à cette question, qui est une formule empruntée à Cocteau parlant de l’artiste et de son audace. Mais je crois qu’elle résume bien la problématique évoquée par mon spectacle, et la perplexité parfois du grand public en matière d’art contemporain, et particulièrement d’art conceptuel.

Pourquoi ce choix d’un jeu de théâtre sous forme d’une conférence ?
Le terme de « conférence » risque de faire fuir certains spectateurs qui s’attendent à du théâtre, je dirais plutôt qu’il s’agit d’un reportage ou mieux d’une enquête dont je serais l’inspecteur. Enquête quasi policière et en tout cas théâtrale, puisqu’elle ne manque ni d’humour ni de rebondissements. Je crois que c’est ce qui fait que j’ai joué ce spectacle plus de 700 fois depuis sa création, et que je ne m’en lasse pas.

Venir jouer à Hong-Kong représente quoi pour vous ?
Une étape de plus dans « l’internationalisation » de ma pièce qui est beaucoup moins casanière que moi ! Traduite dans d’autres langues elle a été représentée en Allemagne, en Russie, au Portugal, au Brésil, en Suède, etc. et elle m’a conduit moi-même pour la jouer en français bien au-delà de l’Hexagone, à Nouméa, à la Réunion, à New-York, à Amsterdam, à La Haye, à Rio, et maintenant à Hong-Kong où elle fera ses débuts en Asie ! Et ça, c’est pas rien !

« Intra Muros » par Alexis Michalik
Echange avec l’auteur et acteur, Alexis Michalik

Trait d’union : La prison, sujet dur mais traité avec une rare finesse et beaucoup d’humanité. Pourquoi ce choix ?
Alexis Michalik : Ce sont avant tout des histoires qui me viennent. J’avais réalisé un court métrage primé à un festival et l’un de ces prix était remis par les détenus de la prison attenante au festival. Ils avaient regardé une sélection de courts métrages et avaient distingué le mien, nous sommes donc allés, avec mon actrice, les rencontrer, c’était bien évidemment la première fois que je mettais les pieds dans une prison. J’ai discuté avec eux et me suis alors rendu compte qu’ils avaient une notion du temps tellement différente de la notre. Après notre discussion, j’ai pensé en faire une pièce, l’histoire à muri dans ma tête pendant un an jusqu’à faire Intra Muros.

Quelles ont été les réactions du public ?
Très bonne, la pièce a été créée en février 2017 et joue toujours depuis. Elle a tourné partout dans le monde francophone. Le public est très ému avec aussi des rires. Je voulais ce mélange de style entre rires et larmes pour jouer avec les émotions et bien incarner ce que ressentent ces détenus qui sont atrophiés tant au niveau de leurs sentiments que de leurs propres émotions.

Quel est votre regard sur le monde carcéral ?
C’est un système profondément injuste qui n’a pas changé, la prison continue de fabriquer des criminels et non pas de les aider et en même temps le but de la prison est de punir ces criminels. C’est une question philosophique pour laquelle nous pourrions parler durant des heures. J’ai beaucoup lu, avant d’écrire Intra muros, sur la prison, sur les personnes qui aident en prison et sur l’état des lieux et c’est évidemment un problème particulièrement difficile à résoudre

Venir jouer à Hong-Kong représente quoi pour vous ?
C’est génial. C’est une ville qui me fait rêver, j’ai grandit avec les films des cinéastes hongkongais, j’adorais voir Hong-Kong filmée par ces cinéastes brillants.