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L’Asie, destination oubliée des futures politiques étrangères ?

Par Dr Antoine Martin

Composante importante du système, la politique étrangère n’a que peu de place dans les ébauches de programmes des principaux candidats aux élections. A gauche comme à droite, les esprits se canalisent sur quelques sujets, centrés notamment sur l’avenir de la France au sein de l’Europe, le terrorisme international, et sur l’impact de la situation syrienne – intervention russe incluse – sur ce dernier. Peu d’attention, cependant, est consacrée aux politiques asiatiques, probablement perçues comme une source de problèmes dans un monde de moins en moins ouvert à la mondialisation. En bref, l’Asie ne représente potentiellement qu’une menace que l’on pourra soit traiter comme telle, soit oublier, mais elle n’est pas à l’heure actuelle présentée comme une opportunité.

A droite, un positionnement tranché

Sur l’Europe, François Fillon s’oppose au système. Le couple franco-allemand reste une priorité mais le but est de tendre vers une Europe (respectueuse) des nations loin d’un processus décisionnel décrit comme délétère.

Le Moyen-Orient est stratégique. La Syrie est une solution au problème terroriste (les conflits restent au second plan) et la Russie – solution au problème syrien – doit bénéficier de “relations franches et solides”. Elle n’est cependant pas un partenaire significatif, pas plus d’un point de vue énergétique que commercial.

L’alignement de la France sur la politique américaine est enfin remis en cause, mais pas de politiques africaines ou asiatiques. L’objectif n’est pas de créer des opportunités mais d’assurer un rayonnement français.

A gauche, l’Europe ?

La politique étrangère de Manuel Valls pourrait être la plus européenne. Parmi ses “grandes orientations”, une harmonisation fiscale, un salaire minimum, une politique migratoire maîtrisée, un modèle social européen, des frontières et un couple franco-allemand sont les grands thèmes. Hors Europe, la politique étrangère de l’ancien Premier ministre est limitée. Probablement – et au risque de discréditer la politique du gouvernement – la ligne tenue sur le dossier syrien et russe restera inchangée. Du côté asiatique, rien à signaler.

Les programmes des autres candidats à la primaire de la gauche, ne marquent pas les esprits. Les politiques étrangères de Vincent Peillon ou d’Arnaud Montebourg n’ont pas attiré l’attention. Pour Benoît Hamon, l’euroscepticisme semble être une question de fuite de l’électorat vers le Front National plutôt que de gouvernance. Le programme d’Emmanuel Macron, l’électron libre, est lui aussi attendu mais, faute d’un passé politique axé sur le sujet, la politique étrangère du candidat est à ce jour incertaine.

Des extrêmes plus engagés

A gauche, Jean-Luc Mélenchon, veut rompre avec le “grand marché transatlantique” et prône une alliance avec les pays émergents loin des schémas géopolitiques dominants jugés grotesques. Le candidat assume n’avoir “aucune tendresse” pour les régimes chinois et russes et mettait en décembre dernier l’accent sur l’idée qu’ “il faut arrêter les guerres” (France Inter).

Au Front National, on envisage des politiques dont, cela dit en passant, aucun autre candidat ne parle. Au delà d’une sortie de l’OTAN et de l’Union européenne, sont prévues une politique africaine (actuellement “abandonnée” à la Chine et aux pays émergents), une politique pour les pays arabes et, enfin, une “politique asiatique volontariste” misant sur un “retour de l’Asie” où l’absence française est “criante”. Donc, objectif Inde, Indonésie et Malaisie, mais aussi spécialisation des équipes diplomatiques. Le projet, cependant, n’est pas présenté comme un moyen d’ouvrir des portes ni comme une opportunité de d’accéder à de nouveaux marchés. Il s’agit ici d’un “projet de puissance” visant à “retrouver notre influence”.

L’Asie, une lointaine menace…

Chine inondant les marchés ? Crainte des pertes d’emplois liées aux délocalisations et à la mondialisation ? Malheureuse omission ? La politique étrangère de la France ne visera donc probablement pas à présenter l’Asie comme une zone à fort potentiel commercial et n’aura vraisemblablement pas pour ambition de soutenir les investissements ni le développement commercial des entreprises françaises sur les marchés de la région.

Affaire à suivre…