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Amandine Lourdel : 10 000 km pour un fourire, entre Paris et l’Asie

Amandine Lourdel débarque à Hong Kong le 17 septembre avec son spectacle « Renversée » ! De Paris à Hong Kong en passant par Bangkok et Singapour, l’humoriste française prouve que l’humour n’a pas de frontières. À travers des thèmes universels comme l’amour, la solitude et les clichés sociaux, elle bouscule les tabous avec un mélange de tendresse et d’ironie mordante. Rencontre avec une artiste qui ose tout, même s’exporter à 10 000 km de chez elle.

Propos recueillis par Catya Martin

Le stand-up en Asie, c’est encore un phénomène assez récent pour les francophones. Vous qui avez conquis la Comédie de Paris et France Inter, comment appréhendez-vous cette scène émergente à HK ?

Amandine Lourdel : J’ai déjà joué à Zurich, à Amsterdam et au Québec. À chaque fois, ce fut une expérience incroyable, car le public y est très réceptif. On sent vraiment qu’il est heureux d’entendre un spectacle en français, comme un petit air de chez soi. Il s’en dégage une énergie particulière, très chaleureuse. Pour l’Asie — Bangkok, Hong Kong et Singapour —, j’ai échangé avec des humoristes qui ont déjà fait cette tournée. J’ai quelques retours, mais je n’ai pas d’attentes précises. J’ai surtout hâte de découvrir comment cela va se passer, et je suis ravie à l’idée d’y aller.

Que représente pour vous le fait de venir jouer à 10 000 km de chez vous ?

C’est assez incroyable de réaliser que ce métier me permet de voyager aussi loin. C’était l’un de mes rêves : que le théâtre me donne des ailes.

Vous avez grandi dans l’Aube en rêvant de « théâtre intelligent », puis vous avez découvert le stand-up grâce à Blanche Gardin ou Norah Hamzawi. Que vous ont-elles apporté ?

Elles m’ont montré qu’on peut faire rire avec des sujets qui, a priori, ne sont pas drôles : la solitude ou le sentiment de ne pas appartenir à grand-chose.

« Renversée », c’est un spectacle qui évolue encore. Qu’est-ce que Hong Kong va vous inspirer pour cette version ?

Je ne sais pas si Hong Kong apportera des changements majeurs à mon spectacle, d’autant que j’y reste peu de temps… Mais sait-on jamais ? Peut-être que cette expérience transformera ma vie.

Vous parlez de féminisme, d’addictions, de la « cantine de l’amour »… Est-ce qu’il y a des sujets que vous n’osez toujours pas aborder sur scène ?

Je n’ai pas de sujet que j’ose aborder moins que d’autres, mais pour un premier spectacle, certaines choses sont peut-être moins approfondies. Pas par peur, mais par envie de ne pas être trop crue. Je pense qu’avec le temps, si je trouve vraiment mon public, j’aurai moins de réticences. En France, on reproche souvent aux humoristes femmes de parler trop de leur vie intime, de leur corps ou de leur sexualité. Aux États-Unis, elles semblent jouir d’une liberté totale sur ces sujets, sans que cela leur soit reproché. J’espère qu’un jour, la France en arrivera là aussi.

Vous dites : « Je suis restée coincée dans la cantine de l’amour ». Pouvez-vous nous l’expliquer ?

Dans mon spectacle, je raconte qu’une amie m’a dit : « T’inquiète, bientôt tout le monde va divorcer, tout ce qu’on a à faire, c’est attendre le deuxième service. » Et moi, je réponds : « OK, donc je suis coincée dans la cantine de l’amour, et j’attends qu’il y ait du rab. » C’est une métaphore ironique : comme si la vie sentimentale se résumait à attendre que des gens divorcent ou refassent leur vie. Mon personnage, lui, a quelque chose de rêveur : il attend autre chose, quelque chose de plus grand que le simple « deuxième service ».

Votre chronique sur France Inter, c’est un peu « Renversée » en format court. Est-ce que l’humour radio et l’humour sur scène vous permettent de dire les mêmes choses, ou est-ce que la scène reste votre terrain de liberté absolue ?

J’adore la radio, mais c’est un exercice très différent. À la radio, c’est un one-shot. Un sketch sur scène, en revanche, peut évoluer pendant des mois, voire des années. La liberté du spectacle vivant est incomparable. Sur les réseaux sociaux, on peut essuyer des commentaires désagréables de gens qui n’aiment pas notre travail et qui pourraient simplement passer leur chemin. Sur scène, le lien avec le public est tout autre : les spectateurs sont venus pour partager ce moment. Il y a du recul, de l’écoute, et les nuances de l’humour passent bien mieux.

Le sarcasme et l’ironie, ça passe comment dans une ville où l’humour est souvent plus… poli ?

Je ne crois pas qu’on puisse généraliser selon les villes. Dans les grandes villes, le public est parfois plus ouvert, mais tout dépend des soirs et des salles. L’essentiel, c’est que les gens comprennent qu’en humour, il faut toujours garder une certaine distance par rapport aux propos tenus. Globalement, cela se passe toujours bien. Certains publics expriment leur enthousiasme de manière plus bruyante, mais dans l’ensemble, j’ai la chance d’avoir un public plutôt ouvert et bienveillant.

Vous avez dit : « Je vais où la vie m’emmène ». Est-ce que Hong Kong pourrait être une étape vers d’autres scènes asiatiques (Singapour, Tokyo) ? Ou est-ce que la France reste votre port d’attache ?

La France reste mon port d’attache. Je suis peut-être même encore trop attachée à Paris, alors que j’aimerais vivre ailleurs. Pour l’instant, j’ai l’impression de ne pas pouvoir m’en détacher… Mais qui sait ? Un jour, je m’installerai peut-être ailleurs. J’aimerais rejouer dans des pays lointains en y restant plus longtemps.

Après le stand-up, vous imaginez quoi ? Un one-woman-show plus théâtral ? Écrire pour d’autres humoristes ? Y a-t-il un projet qui vous fait envie en ce moment ?

J’espère d’abord écrire un deuxième spectacle. Ensuite, je verrai quels projets s’offriront à moi. Sinon, je change radicalement de vie : j’ouvre un petit café au bord de la mer, avec des focaccias et des spécialités maison, ou une ludothèque, ou encore un bar à jeux. Comme ça, je passerais mes journées à jouer, et ce serait parfait.

Vous parlez de votre spectacle comme d’un « moment intime ». Est-ce qu’il y a une scène ou une réplique de « Renversée » qui vous touche encore, après des centaines de représentations ?

Certains passages restent toujours particuliers à jouer, comme la fin, souvent émouvante, ou ceux où j’évoque mon père ou ma rencontre avec mon ex. À chaque fois, cela me touche profondément.

Vous avez dit : « J’attends le deuxième service » – est-ce que Hong Kong, c’est un peu ce deuxième service ?

Hong Kong n’est pas le « deuxième service » dont je parle dans mon spectacle — c’est une métaphore sur l’amour. Après… qui sait ? Peut-être que j’y rencontrerai une « seconde main ». Un riche banquier ? J’ai l’impression que tous les expatriés de Hong Kong sont banquiers… ce qui est sûrement un cliché !

Est-ce que vous adaptez des blagues pour les expats ?

Je ne pense pas devoir adapter mes blagues. Les expatriés ont généralement les références culturelles françaises, donc cela devrait passer sans problème.

Votre spectacle évolue – est-ce que Hong Kong va y laisser une trace ?

Je ne sais pas encore si Hong Kong laissera des traces en moi, mais j’espère ! Sur mes trois dates en Asie, je me dis que j’écrirai peut-être une chronique sur cette expérience et ma rencontre avec les expatriés. Oui, cela pourrait devenir une vraie source d’inspiration.

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SPOTLINE présente Amandine Lourdel avec son spectacle “Renversée”

Le 17 septembre 2025 à Hong Kong – Basehall 02 à 20h – 1 Connaught Place, #LG/F, Central, Hong Kong Island

Tarifs : • 290 HKD en prévente • 340 HKD sur place – Billets